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2007 Vendredi 26 Oct
au Mardi 06 Nov 2007 par Maurice
« Voyager c'est vivre, Vivre c'est apprendre »
La Tanzanie nous attend pour prolonger nos rêves d'enfant dans des décors de commencement du monde, dans les campements de brousse au milieu des grands fauves, quand l'aube se lèvesur le Kilimandjaro et ses neiges éternelles. Mais aussi Zanzibar dont la simple évocation du mot doux et rocailleux à la fois ronronne comme une étrange mélodie exotique, morceau d'orient au large de l'Afrique. Nom magique chargé de rêves d'épices odorantes et de palais des Mille et une nuits. J1 : BÂLE - PARIS - LONDRES - NAIROBI 26/10/07
Une heure du matin : l'Alsace se réveille et s'ébroue. C'est déjà le moment de se mettre en route, l'aventure n'attend pas. A des milliers de kilomètres de là les grands fauves dorment soupirant en pensant à la nouvelle fournée de touristes auxquels il faudra se montrer. A moindre distance, les "français de l'intérieur" sont encore au fond de leur lit. Ce qui n'étonnera personne ! La jonction se fait à Londres dans la joie et l'allégresse des retrouvailles. Puis c'est l'attente. Le premier retard. Une fois encore il s'avère que l'avion est un moyen rapide de déplacement à condition de décoller, ce qui fini par arriver. Dans la précipitation et l'euphorie du départ tant attendu deux membres de notre groupe se retrouvent seuls dans un « jumbo » qui traînait sur le tarmac et dont la porte était ouverte. Heureusement ils ont retrouvé le bon appareil, inquiets qu'ils étaient de se trouver seuls à bord. Je tais le nom de ces malheureux mais je ne puis m'empêcher de penser que Lulu est une mère et belle-mère irresponsable. Après un vol sans histoires le commandant de bord a posé ou plutôt laisser choir de façon brutale son appareil sur la piste de Nairobi. Là nous retrouvons Nath et GG en compagnie de James notre correspondant local et surtout nous prenons contact avec l'Afrique grande et mystérieuse. Premier mystère : l'avion privé qui devait nous transférer à Kilimandjaro a tout simplement disparu sans laisser de trace. A défaut d'avion privé nous sommes privés d'avion. Nouvelle attente le temps de trouver un hôtel et un bus pour s'y rendre. Dans des conditions aussi extrêmes ne reste qu'une solution pour assurer la survie du groupe : organiser un appéro nocturne et improvisé sur le trottoir devant l'aéroport. Et c'est avec un moral tout neuf et une haleine chargée que nous prenons nos chambres au NAIROBI SERENA.
J2 NAIROBI - KILIMANDJARO - TARANGIRE 27/10/07 Réveil aléatoire. Chacun a pu se refaire une petite santé dans ce magnifique palace. Midi rendez-vous avec un nouvel avion qui doit nous amener à pied d'oeuvre. Les « big fives » n'attendent pas... Par bonheur l'appareil est là en temps et en heure pour nous déposer à KILMANDJARO.
Malheureusement un gros ciel nuageux nous empêche de voir le toit de l'Afrique: celui que l'on nomme « petite montagne » en swahili, montagne de l'eau pour les Masaïs, montagne des caravanes pour les Chegas. Pour nous il aura un nouveau patronyme : « amas nuageux ». Il nous reste à rejoindre le parc national de TARANGIRE. Nouvel avion, nouveau problème: nous sommes vingt et il n'y a que dix neuf places !!! Il faut donc un volontaire pour s'y rendre en voiture ( 4h de piste contre 20 minutes en avion ! ) . Comme toujours le tirage au sort à ETAPP se fait par désignation. C'est GG qui s'y colle. Nath en compagne fidèle voire possessive renonce au confort pour l'accompagner ce qui a pour effet immédiat de libérer une place, ce qui permettrait à GG de prendre l'avion, mais comme Nath! Carrément cornélien. Finalement nous embarquons à 15 ayant égaré 4 personnes dans l'aéroport. Faux départ. Le pilote nous fait ressortir de l'avion au motif qu'il a oublié de faire le plein de kérosène. Incident qui nous permet de retrouver le chaînon manquant. Comme tout finit par arriver nous nous posons sur une piste de latérite en pleine brousse où nous attendent les 4x4, nos chauffeurs pisteurs et un somptueux pique-nique. L'aventure est en marche. Le temps de se répartir en quatre groupes : Tembo (l'éléphant), Simba(le lion), Chui (le léopard) et enfin Faru ( le rhino ) et nous voilà lancés dans le safari. A nous les les grands fauves et les petites bêtes aussi.
La première ligne de notre bestiaire est consacrée à deux mouches tsé-tsé égarées dans le véhicule. Premiers frissons vite calmés par le chauffeur, d'après lui elles sont "non contaminantes", Sacré coup d'oeil !! Nous passons dans une autre dimension avec l'animal suivant. Nous nous retrouvons bec à nez avec un black-bellied bustard, petit oiseau dont nous ignorions jusqu'à l'existence même. Ce passereau tout étonné d'être la star de service se prête gentiment à la séance photo. Dans la série toujours plus fort et plus gros nous tombons sur un dik-dik, gazelle naine, improbable croisement entre un lièvre et un daman, aussi petite que craintive. Notre tableau de chasse, à l'arrivée compte une autruche mâle, des zèbres, deux éléphants, des antilopes de Cobe et de nombreux oiseaux de toutes les couleurs. Accueil chaleureux au MAWE SINGA Camp qui domine le lac Tarangire et qui se compose d'une douzaine de tentes chacune perchée sur un rocher granitique.
Coucher de soleil sur le lac, l'incontournable et traditionnel appéro autour d'un feu de camp. Grisée par l'ambiance autant que par le scotch, Jeannine dans un élan de générosité incontrôlé propose la bouteille de whisky à un de nos masaïs qui ravi de l'aubaine autant que par le sourire ravageur de la donatrice s'échappe avec le divin breuvage. Et une de moins... Dîner raide et bon suivi d'un couvre-feu immédiat certains étant déjà à la limite de l'implosion.
J3 TARANGIRE - PLANTATION 28/10/07 « Le chemin compte autant que l'endroit où il nous amène » Juste avant l'aube, un vaste silence règne sur le camp. Une brise légère amène un peu de fraîcheur et fait vibrer les feuilles des arbres. Non, plus un bruit. Les fauves se sont tus, les insectes sont posés, les femmes dorment encore. Ultime repos avant la chasse. Chacun va reprendre son rôle. Prédateur ou victime. Il est cinq heures et le parc s'éveille à peine. Impression de sérénité. On se laisse enivrer par les parfums qui flottent: mélange indéfinissable de fleur de maruba et d 'acacia, d'humus, d'herbes sèches et odeurs fauves. Trêve précaire bientôt troublée par les trilles des oiseaux, les bruits de douches et de chasse d'eau, les borborygmes et grognements des tentes voisines. Bref la vie un instant suspendue reprend son cours. Dès le premier contact avec la brousse la magie opère. Dans les 4x4, on roule sur la latérite des pistes bordées de termitières rougeâtres et d'innombrables acacias parasols recouverts de nids de tisserin. Déjà les premiers animaux pointes leur museau : gracieuses gazelles de Grant ou de Thomson aux derrières habillés de raies noires et blanches buffles ruminants aux flancs boueux, dont l'oeil fixe n'augure rien de bon, girafes broutant les cimes des arbres, zèbres mignons dans leur tenue de bagnard, gnous aux allures de clown renfrognés avec leur museau busqué et leur barbiche blanche de vieillard ( pardon Jean), ... et autres antilopes de toutes tailles et de tous poils. Ça et là quelques os blanchis. Reliefs de repas léonins. Mais de lions point. Pour en apercevoir la queue il faut se lever tôt , comme toujours dans la journée ils se terrent et dorment snobant les touristes et leur véhicule. Fort heureusement les chauffeurs, pisteurs émérites n'ont pas leur pareil pour les traquer dans chaque recoin de la brousse et les débusquer en train de rêver bucoliquement dans les herbes avant de s'endormir sans complexes dans un formidable et impressionnant La richesse de la faune est liée à la présence de points d'eau même en saison sèche et cela grâce à la présence de la rivière Tarangire qui donne le nom au parc. Il serait dommage de se focaliser sur les animaux car la beauté de cet endroit est aussi dûe à la présence d'une diversité végétale étonnante d'où ressortent outre les acacias, des euphorbes gigantesques, des arbres à saucisses ( chers à Anne Cécile et Jean ) et bien sûr les baobabs. Ces arbres immenses que les dieux dans leur colère ont plantés à l'envers dit-on tant leur branches paraissent grêles par rapport à leur tronc. Branches que ces géants ont parées de fleurs blanches comme pour saluer notre arrivée. A la sortie du parc nous abordons la montée vers le N' GORONGORO par une longue route boisée qui nous amène à PLANTATION LODGE sise au milieu d'une colline plantée de caféiers. Endroit paradisiaque qui doit son charme à un magnifique jardin renfermant des fleurs et oiseaux de toutes couleurs.
L'arrivée d'une averse aussi tropicale qu'inopinée nous oblige à avancer et prolonger la sacro-sainte séance de désinfection des muqueuses indispensable à tout voyageur voulant éviter la turista. C'est le dur prix à payer !
J4 CRATÈRE DU N'GORONGORO - OLDUVAI 29/10/07 « Savoir où chercher ce que l'on veut encore découvrir est le secret de la découverte » Cette journée consacrée au cratère ou caldera (débat de géologues dans lequel nous ne nous immiscerons pas ) du N' Gorongoro commence par un drame épouvantable: Anne-Cécile a perdu sa moitié et mobilise le groupe pour lancer une opération de recherche. Pour ne pas alarmer inutilement la famille et ses amis je tiens à préciser qu'il s'agite de la moitié de son ... cadenas. Le cratère du N' Gorongoro est une conservation et non une réserve, nuance qui permet aux Masaïs, propriétaires de ces terres, de continuer leurs activités pastorales au milieu de la faune sauvage. Tout commence par une route de latérite, traînée de sang au milieu du vert exubérant des champs de maïs. Elle ne cesse de grimper, se perd dans une forêt primitive aux arbres croulant sous les lianes et les épiphytes, flirte avec les nuages quand elle atteint les 2000m d'altitude. Puis soudain une échancrure de végétation, c'est l'incroyable vision du sol qui disparaît soudain. La conservation du N' Gorongoro s'étale là en contrebas comme sortie de la gueule du cratère. Le fond de cette conque est semblable à une vaste scène de théâtre. Jour après jour, nuit après nuit, la nature y présente toute la gamme de ses spectacles : les acteurs changent en permanence , la fin de l'histoire n'est jamais la même et la grande dramaturgie de la faune africaine offre des scènes sans cesse renouvelées.
Les spectateurs que nous sommes s'enfoncent à la recherche des rhinos, des lions ou des
buffles. Nous bravons la canicule de midi pour surprendre les hippos au moment où ils se vautrent dans la boue. Comme au matin du monde zèbres et gnous paissent
tranquilles au pieds des acacias. Cette arche de Noé laisse place à des rêves sans limites. On y retrouve tous
les animaux à l'exception de la girafe dont les grandes pattes ne sauraient affronter les dénivelés.
Et au milieu de tout cela, les Masaïs, vêtus de leur tuniques rouges, se déplaçant avec leurs troupeaux, mouvantes taches de couleur en ce monde ocre et vert. Tout au fond du cratère miroite un lac qui paraît rose par endroits car les flamants y forment une guirlande de plus d'un km de long. Quand on s'approche plus de 10000 volatiles s'envolent d'un coup dans un roulement de tonnerre impressionnant. Si le décollage n'est pas particulièrement gracieux, le vol lui est élégant. Si les gros mammifères retiennent en priorité notre attention, la vie foisonnante du site offre bien d'autres motifs d'émerveillement. Environ 400 espèces d'oiseaux y nichent en permanence ou épisodiquement , comme les cigognes de l'est , qui fuyant les rigueurs hivernales y établissent leurs quartiers d'hiver. Nous découvrons en vrac ibis de Tantale, grues huppées, outardes ... et même des milans qui s'invitent sans vergogne à notre pique-nique. Un moment d'inattention et ils piquent sur vous et vous arrachent votre maigre pitance de leurs serres acérées. Incidents aussi fâcheux que douloureux arrivés à Pascale et Jacqueline. Pour la première fois nous voyons couler le sang dans le N' Gorongoro. C'est la dure loi de la nature! Autres volatiles, autres moeurs. Nous avons croisé deux demoiselles autruche en pleine danse nuptiale devant un mâle de passage qui ne demandait rien à personne et qui d'un coup se retrouve émoustillé. Le voilà lancé à son tour dans une parade amoureuse on ne peut plus gracieuse. Une fois son choix fait il course l'heureuse élue qui joue les vierges effarouchées en entamant une pseudo fuite en remuant du croupion pour finalement s'affaler et subir les assauts pendulaires de son soupirant. Elle sort de cet intermède complètement chiffonnée et ressemble à une serpillière essorée. Le mâle quant à lui continue dignement sa route conscient qu'il est du devoir bien accompli. Que c'est beau la dure loi de la nature ! Autre émotion d'un autre genre celle-ci : des lionnes en chasse. Imaginez un petit troupeau de zèbres dans le lit d'une rivière avec quatre lionnes sur une rive et une cinquième en embuscade de l'autre côté. Plus un bruit. Impression de vibrations dans l'air, la tension est palpable. Les zèbres, crinières hérissées, resserrent les rangs, l'oeil aux aguets pour chercher une fuite possible. L'un d'eux fait une sortie en éclaireur pour repérer une faille dans le traquenard. Puis tout se joue en une fraction de seconde : la lionne bondit et c'est la chevauchée fantastique et effrénée. Après une brève course elle renonce et la tension retombe brusquement. Il n'y aura pas de zèbre au menu au grand soulagement de Bernie. C'est vraiment à se demander si Noé ne vint pas ici rassembler les animaux pour son arche. Pas un ne manque dans la plaine, les rivières ou le ciel. Ils sont là presque à portée de main, rejouant inlassablement la plus grandiose des partitions, celle de la vie sauvage. Mais la vie tout court reprend le dessus et nous oblige à quitter cet endroit féerique pour rejoindre OLDUVAI CAMP ultime étape du jour.
Il s'agit d'un petit camp de tentes adossées à un kopje au milieu de nulle part. L'eau y est rare donc à utiliser parcimonieusement : 20 litres par douche pour deux personnes. S'offrent plusieurs solutions : partager équitablement l'eau en deux, soit une personne sur deux qui se douche ou encore la prendre ensemble. Tous ces cas de figures ont été utilisés. Ne compter pas sur moi pour dénoncer ceux qui manquent d'hygiène ou les duettistes. Accompagnés par deux Masaïs nous faisons une ( très ) petite marche pour voir le coucher du soleil du haut d'un kopje ( se dit copi ). Amas caractéristiques de blocs de granit polis par le temps les kopjes apparaissent comme des îles flottantes, surréalistes, sur un océan d'herbes rases. Plantés d'acacias, d'hibiscus, d'aloès ... ils fournissent des cachettes aux animaux comme les damans des roches, les mangoustes, les genettes voire de petites antilopes comme le dik-dik et les orétragues sauteurs. Très vite le silence retombe sur le camp. Seuls veillent les Masaïs qui nous gardent sous le scintillement de la Croix du Sud. J5 OLDUVAI - SERENGETI 30/10/07
« La route ne me semble captivante que si j'ignore le lieu où elle me conduit » (Alexandra David- Neel ) Le soleil brille à peine sur l'immense plaine herbeuse d'où n'émergent que les acacias et les kopjes que déjà la vie trépidante de la nature a repris ses droits. Nath arrive au petit déjeuner dans le même état que l'autruche de la veille. Murmures admiratifs à l'egard de GG et quand même un peu de commisération pour Nath. Mais que voulez-vous c'est la` dure loi de la nature et la piste nous attend. Nous voilà partis pour le SERENGETI, « la terre qui court sans fin ». A perte de vue s'étale la plaine d'herbe rase ponctuée d'îlots de verdure et d'épineux ,d'où émergent les longs cous tachetés des girafes brouteuses de hautes branches qui broient les épines acérées des acacias comme s'il s'agissait de tendres laitues. C'est la dame aux acacias, la reine africaine, la tour Eiffel en treillis léopard. Ces cils immenses lui donnent un regard écarquillé, un air de beauté évaporée. De ses 5 à 6m de hauteur elle vous toise avec une élégante indifférence et pour peu que l'on s'en approcha d'avantage elle pivote et décolle en un galop chaloupé. Topis ou damalisques aux flancs bleus, antilopes, gazelles, gnou, impalas et zèbres semblent désherber inlassablement la savane tout en guettant un éventuel prédateur comme le guépard qui n'est jamais bien loin et qui bondit sans crier gare, rapide comme une flèche pour saigner sa proie. Son ami le léopard est plus discret et chasse la nuit. Nonchalamment vautré sur une branche d'acacias, les quatre pattes pendues dans le vide, le félin affiche un dédain hautain, ouvre une large gueule aux crocs luisants et continue sa sieste sans même un regard pour les touristes fascinés. Ça et là un groupe de phacochères trapus, avec leurs crinières miteuses, s'enfuient dandinant leur corps de teckels grassouillets, la queue dressée à la verticale. Au milieu d'eux une hyène, comparse peu ragoûtante du grand théâtre de la nature, épaules larges et hanches étroites, se fraye un passage. Sa mâchoire puissante est capable de broyer du métal. "You are lucky" dit notre chauffeur pisteur en nous amenant au milieu d'un troupeau d'éléphants se livrant à des ébats aquatiques avant de se saupoudrer de terre pour se protéger de la chaleur, des insectes et des parasites qui fourmillent dans leurs replis. D'autres se frottent consciencieusement la panse et les fesses contre les berges de la rivière. Puis l'un après l'autre ils ressortent du cours d'eau pour se remettre en colonne et continuer tranquillement leur vie communautaire. Encastré entre leurs pattes puissantes les éléphanteaux marchent sous l'abri du ventre maternel. Moment de grosse frayeur : un gros mâle se met en travers de notre route le temps d'abattre un acacia , faisant claquer ses oreilles sur ses épaules, barrissant trompe levée vers le ciel et piaffant au point de faire trembler le sol. Petite démonstration de force de l'animal terrestre le plus grand. Après son passage les buissons et les arbres sont déchiquetés. On dirait qu'un cyclone vient de s’abattre sur la savane. Avant de regagner notre camp du jour petit détour vers un marigot surpeuplé d'hippopotames. Véritables agglutinat de grosses vaches grises et rondes qui affleurent de cette fosse à purin dans un roulis de clapotis et de bulles comme à l'ouverture d'un jacuzzi. Leurs yeux ronds comme des billes posés sur l'eau ils expulsent l'eau de leurs narines en jets bruyants. Mais cette grosse bouée flottante et placide peut avoir des réactions aussi brutales qu'imprévisible. Sa mâchoire qui s'ouvre à plus de 150° (fait unique) est la première cause d'accidents en Afrique. Les hippos vivent en parfaite symbiose avec les poissons qui les débarrassent de leurs peaux mortes et des parasites. Pendant ce temps d'énormes crocodiles se prélassent sur le rivage et attendent en baillant au soleil que les poissons soient assez gros ou qu'un hippo meurt pour les croquer. Toujours cette dure loi de la nature.
Déjà le soleil baisse à l'horizon et nous rejoignons le LOBO WILD CAMP pour la nuit.
J6 SERENGETI - OLDUVAI 31/10/07
Au lever du jour un groupe de buffle s'approchent du lodge pour paître sous nos fenêtres. D'abord encastré au loin entre la plaine et l'horizon, bloc sombre et presque minéral ils arrivent en roulant leur montagne de muscles, leur force, leur violence et leurs redoutables cornes. Et pourtant cet animal africain qui a le plus de Nemrod à son tableau de chasse vit en parfaite harmonie avec les oiseaux comme le pique-boeuf et certains hérons (le garde-boeuf) auxquels il sert à la fois d'aérodrome, d'hôtel et de restaurant. Ces oiseaux passent la nuit sur son dos et le jour gobe ses parasites et ses mucosités nasales et auriculaires. Par contre il peut charger comme une brute en mugissant, se cabrer et faire détaler une lionne ( son ennemie héréditaire ) aussi penaude qu'un chat pris dans un garde-manger. Après le petit déjeuner notre caravane reprend la piste dans la région des kopjes le long des rivières BAGATI et SERONERA qui n'ont plus guère d'eau en cette saison sèche. Ici croisent les grands troupeaux en migration. En premier et probablement les plus nombreux: les gnous, ces lourds ongulés à la crinières de cheval et aux cornes de taureaux prolifèrent. Ils se suivent front contre croupe à la recherche d'eau et de fourrage. Etrange animal classé par les zoologistes parmi ces créatures délicieuses que sont les antilopes. Ils semblent créés de bric et de broc, avec des pièces empruntées à divers animaux. Sur un corps maigre de vache ils la tête et les cornes d'un boeuf musqué, la barbe d'un bouc et enfin la queue et la crinière d'un cheval. Les adultes ont un pelage gris ardoise à reflets bleutés et les jeunes un beau roux vif où brille le noir velouté de leur petit museau. Ce vagabond dans l'âme qu'est le zèbre n'est jamais très loin des gnous. Cet équidé fessu à la parure excentrique est le seul à ne vivre qu'en Afrique. Véritable tableau abstrait dans la savane africaine . Au galop il ressemble à un bagnard en cavale. Est-ce pour s'amuser que la nature lui a fait un tel costume ? Pas sûr. Il se pourrait sans qu'on en ait la certitude que robe singulière lui permet d'éloigner les insectes. Elle servirait aussi à brouiller la vue des prédateurs au lever et coucher du soleil. Premier code-barres pour se repérer dans la nature ? Et partout broutant sans fin les belles et menues gazelles de Thomson au pelage d'un beau roux surligné de bandes blanches et noires. Leur regard de biche effarouchée vous donnent envie de vous arrêter pour les caresser. Mais nous savons déjà que la nature est cruelle : il s'agit là du met préféré des carnassiers. Durée de vie d'une « thomie » varie entre 15 minutes et 12 ans ». Pour elle la mort peut jaillir des fleuves, des arbres, de la savane et des airs. L'aigle ravisseur la repère de loin et la dépèce aisément dans les airs. C'est elle que vise d'abord le crocodile, fin gourmet, quand elle traverse la rivière. Le babouin aux dents cruelles la cueille d'un revers de main. Le python la flaire de sa langue dardée et n'en fait qu'une bouchée. Vite croquée, vite procrée (l’amoureuse la plus rapide de l’Est) la gazelle de Thomson prouve qu' Eros et Thanatos, l'amour et la mort, font encore bon ménage tant que l'herbe pousse et que l'homme ne s'en mêle pas. Cette brave gazelle nourrit les fauves en fabricant inlassablement de l'animal avec du végétal. Toujours cette dure loi... Pendant ce temps les lions dorment affalés dans l'herbe tels des chatons sur un radiateur en plein hiver. Tant que le soleil cogne le souverain a tout son temps. Ses grands yeux couleur miel scrutent les intrus d'un air renfrogné chassant les mouches d'un coup de queue désabusé, puis se vautre d'un flanc sur l'autre avec des bâillements à faire pitié avant de replonger dans sa léthargie. En privé , le roi de la savane se révèle fainéant, charognard tyrannique mais aussi tendre, inventif et téméraire. Bref fascinant. Un peu plus loin un guépard, ce lévrier à tête de chat, fixe l'horizon de sa prunelle d'or. Sa robe ocellée de taches pleines brille au soleil déclinant. Du coin de l'oeil à sa bouche deux sillons noirs caractéristiques, les larmiers , enferment sa tête de seigneur dans un mutisme hautain. L'heure tourne et une étape culturelle nous attend au musée d' Oldupai qui se veut le berceau de l'humanité. En effet au fond de cette immense crevasse, le Rift, qui entaille l'Afrique de part en part, un pied menu a laissé sa marque dans la boue pétrifiée, attestant qu'il y a plus de trois millions d'année l'homme naissait ( aussi ) ici. C'est une jeune femme qui entraînait dans sa course un petit enfant. Dernière arrêt : un « authentique » village masaï non destiné aux touristes c'est pour quoi nous le visitons. Les Masaïs sont un peuple fier de haute stature et aux traits fins. Ils ont une réputation de guerriers terribles capables d'attraper un lion par la queue?. Aujourd'hui se sont de simples pasteurs semi nomades, éleveurs de bovins. Pour les comprendre il faut connaître leur genèse. Au commencement du temps Enkaï, le créateur du monde, a crée des petits hommes, les ndorobos, auxquels il a donné le miel et les animaux sauvages. Puis il a crée les cultivateurs et leur a offert les semences et les greniers. Enfin , à ces enfants préférés, les Masaïs il a fait don du bétail. Les troupeaux sont arrivés en descendant le long d'un arc en ciel reliant les cieux à la terre. Admiratif de ce divin bétail, un Ndorobo, demande à en recevoir aussi. Enka¨lui répond qu'il a déjà reçu sa part. Fou de jalousie, le petit homme coupe la corde céleste. Depuis ce jour les dons du ciel ont pris fin et les hommes doivent peiner pour survivre. Les Masaïs se considèrent depuis comme propriétaire du bétail du monde entier ce qui pose encore des problèmes de voisinage. S'acquitter de ce privilège divin consiste à consacrer toute leur existence à la bonne garde des troupeaux. L'homme adulte est un guerrier traditionnellement chasseur de lions ce qui revient à dire qu'il ne fournit aucun travail. Les adolescents sont chargés du gardiennage du troupeau. Quant aux femmes, tondues dès leur jeune âge, elles assurent la construction des cases et leur entretien. Elles en sont propriétaires comme elles le sont du lait. Elles fabriquent aussi les objets de consommation courante et des bijoux de perles tressées. Elles seules ont le droit de traire les vaches. Les Masaïs sont polygames mais à l'intérieur de la case la femme est libre de repousser les avances de l'homme qui doit alors chercher un toit ailleurs. Tout ce petit monde vit de lait de sang de boeuf et de graisse uniquement. A notre arrivée la population entière, en habits d'apparat se tient à l'entrée du village composé de huttes faites de branchages, terre et bouses de vaches séchées, le tout ceint par une fortification en branches d'acacias dont le but est de protéger les animaux et les femmes des lions chapardeurs et des... hommes empressés. Filiformes dans leurs tuniques sanguines, le rouge de leur terre, le rouge masaï. Toges, sandales, javelots irradiants de lumière... ces guerriers font penser aux légions égarées d'Antoine. A l'extérieur de l'enclos une petite maison en branchage : l'école du village où les enfants et leur maîtresse nous accueillent en chanson puis nous récitent l'alphabet et les chiffres. Nous avons même droit à des applaudissements nourris pour l'obole et les stylos que nous laissons à cette noble institution.
[video de danses de guerriers] Nous quittons le camp pour rejoindre le notre : OLDUVAI CAMP et ses douches réputées.
J7 OLDUVAI - ARUSHA - KARAFU 1/11/07
« Quand on joue de la flûte à Zanzibar l'Afrique danse jusqu'aux grands lacs » (
proverbe arabe ) Nous quittons la savane ce matin pour d'autres horizons. Une dernière fois nous empruntons une piste dans un décor très « Out of Africa » ponctuée de girafes, de gazelles et de zèbres. Au passage quelques vautours, ces valets de la mort, terminent leur sinistre besogne de nettoyeur de la savane. Second rôles rangés en larges cercles concentriques à distance des fauves qui entament leur proie. Ils tombent du ciel sitôt que les autres se retirent et touchent terre dans un atterrissage pas toujours contrôlé. Tout à coup la plaine sans fin laisse place à des lacets de latérite qui partent vers les nuages qui bientôt nous cernent et qui rendent cette montée du N'GORONGORO encore plus fantasmagorique. Sur l'autre versant descente sur ARUSHA, triste capitale administrative et judiciaire de la région, qui présente comme seuls centres d'intérêt le Red-restaurant et l'aéroport.
Là-bas, au large de la Tanzanie, ZANZIBAR résonne encore de contes orientaux peuplés de princesses voilées, pavés d'or, d'ivoire et d'épices capiteux. Mais les Sultans sont repartis chassés par une révolution. Que reste-t-il ? D'emblée on est frappé par la luxuriance de l'île et par sa verdure. Rien à voir avec le paillasson sec d'où nous venons. Mais nous ne verrons pas grand chose lors de ce premier contact avec la « perle de l'Afrique orientale » puisqu'à notre tour nous allons être parqués dans une réserve.
J8 KARAFU 2/11/07 Journée libre dans notre réserve ! On peut y voir circuler des jeunes femmes noires à robe verte, souriantes, qui entrent et sortent de nos cases. Elles sont faciles à approcher. Ici et là entre les habitations des Masaïs avec leur bâton sur les épaules. Comme partout ils sont là pour garder le troupeau. Vers les points d'eau ce sont d'autres noirs (es) en pantalon et tunique blanche rehaussée d'une large ceinture noire fort seyante. Ce sont eux qui nous approchent avec force «jumbo» ou « hakouna matata ». Ces bonjours, bienvenus et autre il n'y pas de problème swahilis ont remplacé l'écho des tam-tams. Reste une dernière espèce de faune dans ce parc : une ethnie de couleur indéterminée allant du blanc yaourt au rouge écrevisse, se déplaçant péniblement dans des accoutrements indescriptibles. Elle se traîne des cases vers les points de ravitaillement puis s'étale sur la plage ou au bord de la piscine pour enfin retourner à son gîte. Dire que certain affirment que c'est Simba, le lion, le roi fainéant !
J9 KARAFU - KAE - KARAFU 3/11/07 Aujourd'hui grand jour : on nous autorise une première petite sortie de notre réserve. Peut-être pour nous réapprendre progressivement la vie en milieu ouvert. C'est en pirogues à balanciers et à voiles triangulaires que nous glissons sur le lagon bleu émeraude. Cap vers l' « île de Kaé ». Une fois au large le littoral déroule son tapis de sable blanc et de cocotiers brillants. Insensible à la splendeur du paysage Bernie écope la barque pour assurer sa survie et celle de ses compagnons. Bel exemple d'altruisme ! Une grande page de l'histoire de la marine s'écrit dans l'anonymat le plus total.
Débarquement
sur l' « île » pour des activités aussi diverse que variées : bains de mer partie de pétanque version tropicale, achats divers
d'artisanat « local » et barbecue géant. Le retour de cette « île » enchanteresse se fait en...
camionnette partiellement en bois, pour
des raisons de flottaison probablement ! Décidément la nature continue à nous réserver des surprises. Cette journée se termine par une soirée masaï : feu de camp, chants, danses et
repas. Nouveau mystère : comment les Masaïs font-ils les trous dans les macaronis qu'ils nous servent
?? Décidément on nous cache des choses.
J10 KARAFU - ZANZIBAR 4/11/07 « J'en ai marre J'me casse à Zanzibar » Serge Gainsbourg
C'est sûr c'est aujourd'hui le grand jour: nous allons enfin découvrir Zanzibar. « ZAYN ZA'L BARR » ( quel beau pays ) se seraient exclamés les premiers navigateurs arabes. Cinq cent ans après les premiers explorateurs nous l'aborderons avec la même impression déroutante et vertigineuse ?? Stanley en 1874 disait : « A la première vue de ce beau visage il n'est d'étranger qui n'éprouve du plaisir et ne l'exprime. La ville est la Bagdad, l'Ispahan et la Stanboul de l'Afrique de l'est. » Car c'est d'ici qu'autrefois que d'intrépides caravanes arabes partaient vers le continent noir alors encore « Terra Incognita », à la recherche d'esclaves, d'or et d'ivoire. C'était le point de départ de Linvingstone, Stanley, Burton et d'autres explorateurs occidentaux et c'est là qu'ils recrutaient des porteurs et des pisteurs, se ravitaillaient en vivres et en marchandises avant de se lancer à la recherche des sources du Nil. C'est encore ici qu'ils revenaient ( pas tous ) fourbus pour le repos du guerrier... Aujourd'hui la situation a quelque peu changé. Les explorateurs ne cherchent plus rien et les sultans ont cherché fortune ailleurs. Mais le nom de Zanzibar ronronne encore comme une étrange mélodie exotique, évocatrice d'une terre mythique. Après avoir déposé notre modeste bagage au Tembo hôtel, dont la décoration et l'agencement des chambres semblent droit sortis de l'esprit d'un architecte trop longtemps exposé au soleil après une forte consommation d'alcool et d'herbes diverses, nous partons à la découverte de STONE TOWN. Des splendeurs d’antan, il ne subsiste à vrai dire peu de chose hormis le Palais des Merveilles, Baït-el-Ajaib, le Fort Arabe ou le dispensaire Ithansheri construit en l'honneur de la reine Victoria. Les ruelles de Stone town évoquent le décor d'un film surréaliste italien d'après-guerre: toits et terrasses crevés, murs béants, fenêtres obstruées de barreaux de fer, monceaux de gravats où s'abattent des nuées de corbeaux. Mais dans cette atmosphère lugubre peu à peu le charme s'opère. Au détour d'une venelle noirâtre resplendissent soudain les énormes clous en cuivre d'une porte en bois monumentale sculptée de lotus dignes de l'Egypte antique. Plus loin un portail décoré de poissons. Les arabes plantaient des clous à l'entrée de leur palais pour dissuader les assauts des éléphants de guerre. Les moucharabiehs, elles protègent les femmes des regards indiscrets. Celles qui subsistent à Zanzibar sont festonnées comme des dentelles. Le long d'une façade lépreuse, on s'émerveille de découvrir la mosaïque bleutée d'un baraza, (banc à palabres). Les hommes vêtus de kanzy (robe ) et coiffés du koffa (calotte ) s'y sont posés pour à l'ombre pour bavarder. Ici la palabre est un art de vivre. D'autres s'y installent pour partager un café, pour faire la sieste ou une partie de bao, jeu de pierre local. Lieu de toutes les paresses, il rappelle au voyageur que l'île vit au rythme lent du continent tout proche. On se perd dans ce dédale architectural dont nul n'a imaginé dresser les plans ou baptiser les rues. Celles-ci ne sont d'ailleurs pas sans évoquer la médina. Pas de place pour les voitures dans cet étroit labyrinthe enclavé entre une myriade de maisons à plusieurs étages. Des ânes chargés da marchandises et des jeunes garçons poussant des charrettes forment un manège incessant et survolté. Des femmes, dont le tchador noir ne laisse parfois deviner que des yeux de gazelle, s'engouffrent rapidement dans les ruelles. Du fond des échoppes s'échappent des effluves, des odeurs puissantes et envoûtantes. Mais l'agitation est ailleurs. Sur le marché d'antiques bus déversent des flots entiers de passagers chargés de poissons, de poulets, de bananes, cannes à sucre, ananas, mangues, avocats, concombres ... On s'affaire devant et derrière les étals dans un brouhaha incessant, cerné d'odeurs et d 'effluves très éloignées de la girofle ou de la cannelle. A la limite du supportable. Plus loin au sortir d'une ruelle s'étalent les jardins de Foro Dhani. Y paresser sous les lataniers est particulièrement agréable. Dans l'océan tout proche les enfants jouent en plongeant du haut de la jetée. Les Zanzibarites viennent ici rêver face à une mer d'huile où se balancent les dhows, ces lourdes embarcations à voile triangulaire qui servaient jadis à la traite négrière et qui embarquent aujourd'hui les clous de girofle entassés dans leur flancs. Les étals des marchands ambulants laissent échapper des odeurs d'ignames grillés, de poisson ou de poulet en brochettes. Là, torse nu, un paysan actionne un antique moulin à bras broyant des cannes à sucre pour en extraire le jus. Plus loin , bols de soupe à la citronnelle ou cacahouètes baignant dans une sauce piquante sont servies aux promeneurs.
A la nuit tombée la magie se fait plus présente. D'archaïques lampes à pétrole éclairent tout juste les visages des vendeurs, arrondissent gestes et mouvements des passants, transformant le lieu en quelque ballet de l'étrange.
J11 ZANZIBAR 5/11/07 Ici vous vous réveillez avec la rue à l'heure fraîche quand le premier soleil redonne vie aux odeurs de la ville, quand le cri du muezzin s'envole au-dessus des toits et que les pigeons de l'hôtel font le chambard au-dessus de vos têtes. Aujourd'hui journée libre. L'occasion de découvrir cet autre atout de Zanzibar: sa nature généreuse et exubérante. Pour ce faire il suffit de se trouver un chauffeur guide et négocier âprement le montant de la prestation. Départ vers le nord avec un premier arrêt devant LIVINGSTONE HOUSE, vieille bâtisse jaunâtre sans intérêt sinon que le fameux docteur y aurait préparer sa dernière expédition. Le site suivant, MAHURUBI PALACE est bien plus envoûtant. Ce bâtiment, en ruines suite à un incendie, était destiné aux 99 concubines du Sultan. Il comportait donc autant de chambres toutes équipées de bain et de toilettes plus une grande salle avec un bain collectif où le maître des lieux venait faire la « causette » avec l'une ou plusieurs de ces dames. Inutile de rêver Messieurs : « Ce n'est pas à la portée de toutes les bourses ! Aujourd'hui le lieu est désert et les bassins aux nénuphars servent d'abreuvoir à buffle. Ici il ne reste plus que des charpentiers, qui selon des règles immuables, fabriquent des boutres et des barques de pêche qui iront chercher la bonne fortune au Kenya, au Mozambique ou aux Comores. Parfois même au large d'Oman. Dernier arrêt culturel aux bains persans où la Sultane Shéhérazade et ses invités venaient se rafraîchir après leurs promenades.
Maintenant le « spice tour » peut commencer. Partout les habitants des ces villages traditionnels aux maisons en pisé coiffées de feuilles de palmier tressées cultivent de nombreux condiments, fruits et épices au commerce local ou international: girofliers géants, poivrier en lianes, canneliers parfumés, orchidées vanillées, herbe citronnée, muscadiers... Un opulent potager tropical côtoie ce brassage d'odeur où se bousculent pêle-mêle bananiers, manguiers juteux, cocotiers aux milles usages, tamariniers filiformes ou curieux « arbres à rouge à lèvre », dont les gousses chargées de pâte grasse et colorée font le bonheur des jeunes filles. Arrosée par le climat océanique, fertilisée par les vents et gorgée de soleil, l'île ne manque de rien. Cette dernière journée se termine par l'intronisation (les bizuthages étant interdits) des trois nouvelles recrues: Jeannine, Pascale et Jean-Michel. Occasion de leur remettre des objets d'une rare élégance, tout à l'honneur du chic français qu'ils sont tenus d'arborer jusqu'au retour dans la mère-patrie : cravates pour les dames et couvre-chef pour JM.
J12 ZANZIBAR - LONDRES - PARIS/BÂLE 6/11/07
L'heure est venue. Nous laissons derrière nous Stone Town et sa déliquescence superbe et romantique, ses crépis décrépis, ses murs à la blancheur éteinte et ses façades poussiéreuses aux peintures fanées. Nous laissons derrière nous Tembo Hôtel et son mobilier d'un autre âge, ses carillons « Westminster » aux ressorts rouillés, ses portes déglinguées et es escaliers qui grincent. Nous laissons derrière nous Nath et GG qui repartent à l'opposé vers le sud du continent avec toute notre gratitude et notre affection. Nous laissons derrière nous la magie de la Tanzanie, l'or de ses savanes, son cratère auréolé de forêts brumeuses, ses baobabs derrière lesquels le soleil vient se noyer, ses scènes animales les plus étonnantes, les plus féroces et les plus attendrissantes. Nous laissons derrière nous Zanzibar voilée derrière ses lourdes portes, son passé son présent africain et ses rêves d'ouverture sur l'Occident. Restent l'Afrique originelle, les images imprimées dans nos mémoires et le souvenir de ces grands moments d'amitié. Reste surtout la poésie du voyage. Maurice
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