« Le véritable Voyage de découverte ne
consiste pas à chercher de nouveaux
paysages mais à
avoir de nouveaux yeux »
Marcel PROUST
CAMBODGE
-
LAOS
2001
Note d’avertissement
« Nous
présentons les choses vues pour vues et les choses
entendues pour entendues en sorte que notre livre soit
sincère et sans nul mensonge . »
Marco POLO
Devisement du Monde
( 1298 )
Cet
avertissement ne tient pas compte de la licence poétique de
l’auteur, des effets des singles malts ou autres
substances hallucinogènes. Par ailleurs chacun est libre de
faire une analyse stylistique de mes épanodiploses et de
mes épanorthoses qui ne sont que la transcription
oulipienne de mes impressions.
« Joyeux,
je fonçais dans ce réel
persuadé
que j’en rapporterai beaucoup »
Henri
MICHAUX
( Un barabare en
Asie )
Vishnou,
Shiva, Ganesh, Urma, Mahomet, Siddartha, Jésus ... Ils ont
tous passés par la Cambodge et le Laos. Avec plus ou moins
de bonheur. Alors pourquoi pas nous?
Nous
avons donc décidé ( démocratiquement, bien sûr ... ) de
partir à la découverte de ces deux drôles de pays
coincés entre la Thaïlande et le Vietnam. L’un est un
royaume de cités en ruines et de rizières où les hommes
ont la musculature et les traits des pirates, où les
enfants jouent par milliers dans les rues. Un pays meurtri,
incroyablement pauvre. Ici la vie cache toujours un drame,
une rancoeur, une colère. Cette histoire c’est celle du
Cambodge, dont la vie fait dresser les cheveux sur la tête.
( Ceci est une métaphore et non une moquerie s’adressant
aux quelques atrichotiques voire chauves du groupe. )
L’autre...
est un tout autre pays fait de douceurs et de silences.
Entre la Chine de Confucius et l’Asie de Bouddha, au cœur
de l’Indochine profonde, et comme au centre du monde. Vallées
étroites, prairies soyeuses où le Mékong semble couler
des jours heureux. Ici nulle colère, nulle violence mais
des petits villages perchés sur les collines et des pagodes
naïves qui brillent comme des rubis. Au Laos l’Histoire
semble prendre du repos.
J
1
PARIS - SAÏGON
02/11/2001
Pensée
du jour :
« Le plus
court chemin d’un point à un autre
c’est de
ne pas y aller. »
C’est
finalement à 20 que nous partons vers la mythique Indochine
qui a attiré tant de voyageurs et d’aventuriers. Une
première jonction se fait à Strasbourg-Entzheim entre les
Alsaciens et les natifs de l’Outre-Forêts. Et déjà
premier incident : Jacqueline L. essaye de monter à bord
sans carte d’embarquement ce qui parait pour le moins
audacieux ou inconscient en plein plan
« vigie-pirate ».
Le
groupe définitif se forme à Roissy-Charles de Gaulle.
Après une incontournable alerte à la bombe nous montons à
bord d’un avion de la Vietnam Airlines pour un vol vers
HOH CHI MIN ville, Saïgon pour les nostalgiques, avec
escale à Dubaï.
Escale
mise à profit par Gérard S. pour acheter un tube de
dentifrice Aquafresh*. Serait-il attendu à l’arrivée ?
Vol
sans histoires ou incidents notoires.
Nuit à bord.
J
2
SAÏGON
-
PHNOM PENH
03/11/200
Pensée
du jour :
«
Je n’ai peut-être rien à dire mais je le dis.
C’est
pas comme d’autres. »
Saïgon
: nous nous retrouvons affalés dans une salle de transit en
attendant le vol vers PHOM PENH qui se fait attendre. Les
premiers stigmates de la fatigue deviennent apparents.
Patrick s’endort tendrement sur l’épaule d’une
autochtone peu farouche . Nos pilotes finissent par arriver
avec des bagages à main lestés de bouteilles (
indiscrétion du scanner ) : kérosène ou whisky ?
Encore
un peu de patience et ce sera le Cambodge.
« Voyageurs
égarés dans ces contrées inviolables, gardez vous des
étonnements
et des surprises ; vous avez atteint le domaine des
merveilles,
la terre qui reçut la visite des dieux. »
Roland MEYER
« Sarami, danseuse cambodgienne. »
«
Avant de mettre pied à terre observez vos narines : le
côté où la respiration se fait indiquera le pied qu’il
faudra poser en premier, cela est bon ». Tel est
le conseil que donne l’astrologie cambodgienne aux
voyageurs.
Forts
de ces recommandations nous débarquons dans la capitale du
Cambodge dont la constitution de 1993 commence très fort :
« Nous peuple cambodgien ayant une grandiose
civilisation, une réputation retentissante qui brille comme
le diamant ... » Cela a le mérite d’être clair !!
L’aéroport
de PHOM PENH est à peine plus grand que celui de Limoges (
on a les références qu’on peut !). La ville de la Dame
Penh est la « capitale des quatre bras ( quatre bras
pour les quatres voies qui s’y croisent : le
Mékong, le Tonlé Sap, le Mékong antérieur et le Bassac.
), l’heureuse maîtresse du Cambodge, la nouvelle
Indoprostha ( nom officiel de Phom Penh au 15ème siècle.
).
«
C’est une ville hybride bâtie par les Français et
peuplé par les Chinois. »
W.
Sommerset Maugham ( Un gentleman en Asie. )
A
notre descente d’avion nous sommes accueillis avec des
orchidées par la plus belle d’entres toutes :
CHHORVIVOINN, la « jeune fille aux 6
lumières », qui va éclairer la suite de notre
voyage.
A
première vue PHNOM PENH offre le spectacle d’une capitale
blessée et sale qui ressemble à une sous-prefecture
surpeuplée. Mais bien plus fort est le charme d’une
architecture qui rappelle les images des livres et cartes
postales de notre enfance. Il faut aimer Phom Penh pour ce
qu’elle fût, ce qu’il en reste et ce qu’il faut
espérer qu’elle devienne.
Nous
prenons les boulevards des bords du fleuve et on retrouve
alors les avenues espacées des anciennes capitales
coloniales , un génie français ( n’ayons pas peur des
mots ) qui n’a pas été dépassé par le faux progrès
moderne. Cela nous amène à un embarcadère où nous attend
un bateau sensé nous mener au large pour un premier coucher
du soleil sur le Mékong. Malheureusement il semble qu’il
y ait une erreur de communication entre l’astre solaire et
l’agence locale : nous arrivons trop tard.
Nous
retournons donc au débarcadère ( curieusement le même
endroit que l’embarcadère mais pris dans l’autre sens
). La sécurisation de l’endroit laisse François
perplexe. Même avec une forte surprime, il refuserait un
contrat d’assurance.
Nuit à l’Hôtel CAMBODIANA
J
3
PHNOM PENH
- KRATIE
04/11/2001
Pensée
du jour :
« Un
type qui se trompe en disant quelque chose de faux dit peut
être quelque chose de vrai. »
Enfin
le début des vacances : réveil à 5h15, petit déjeuner
6h, départ 7h. Cela a l’air dur lu comme ça, mais quand
c’est dit par Chhorvivoinn cela devient un vrai bonheur.
Dur
quand même.
A
l’aube, donc nous nous embarquons à bord de la Khemara ,
l’un de ces jet-boats qui font la réputation du Mékong
et de la marine cambodgienne. Ce frêle esquif se transforme
rapidement en radeau de la Méduse. Malgré son chargement
hétéroclite en hommes, animaux, marchandises de toutes
sortes, malgré une ligne de flottaison aléatoire cet engin reste au-dessus de l’eau et
fend les flots avec beaucoup d’allure.
Sept
heures de navigation nous permettent de côtoyer les gens du
fleuve et d’admirer ses berges et les villages qui s’y
accrochent. Nous voici donc sur le Mékong . Un nom qui
frappe comme la sonorité d’un gong sous le ciel de la
mousson. Le fleuve-mère, fleuve mythe long de 4020 km .
Toutes les couleurs de rouille se mélangent comme un
fabuleux milk-shake chocolat-vanille. Des tourbillons
instables brossent les flots lourds gavés d’alluvions. Il
grossit les lacs et noie les plaines sans vergogne. Il s’alanguit,
s’avachit, s’étire comme un animal repus, comme un long
serpent qui enserre dans ses méandres une végétation
vaincue d’avance. Tous les démons et tous les dieux , les
rêves et les cauchemars de l’Asie semblent se cacher dans
ce fleuve épopée.
Sur
ses rives, les villages sont construits en hauteur. Il faut
avoir le pied montagnard pour gravir les marches glissantes
taillées dans la berge abrupte. Le dessous des maisons
perchées sur pilotis abrite pêle-mêle les hommes et les
animaux. De loin en loin des monastères aux toits gigognes
couverts de céramiques dorées dressent leurs multiples
cornes effilées avec l’élégante agressivité de yatogan.
Le
soleil est à son zénith ( bref il est midi ) quand
nous accostons à KRATIE, bourgade d’un autre âge qui s’étale
avec nonchalance sur 4-5 km au bord du Mékong. Jadis
première cité « libérée » par les khmers
rouges, statut lui ayant permis d’échapper à la
destruction totale de son architecture délicieusement
obsolète. Cette cité offre l’atmosphère surannée de l’époque
coloniale. Dans la promenade ombragée de frangipaniers, de
teks et de tamariniers on retrouve l’Indochine des romans
de Hougron : un cocktail de sous-préfecture, de ville
balnéaire, d’exotisme de bazar, de pauvreté, d’odeurs,
de population, le tout secoué par un barman
neurasthénique.
Après
une rapide prise de possession de nos chambres nous allons
en ville en passant par le grand marché central pour un
repas à base d’os de poulet sensé renforcer nos sacrums
et autres vertèbres avant de prendre la piste. D’antiques
minibus nous cahotent et nous brinquebalent sur une route
défoncée pour nous amener à la PAGODE AUX CENT
COLONNES.
Si
la voirie est plus que défectueuse ( mais que font
les maires ? ) le bord de la route offre un spectacle haut
en couleurs : vielles maisons khmères sur pilotis et aux
toits de tuiles, paillotes couvertes de chaume, profusion de
cochons qui déambulent de part et d’autre, là un buffle
énorme se roule dans la boue et mâchouille d’un mufle
baveux de tendres nénuphars ou une vache famélique
ruminant l’œil morne en regardant passer les bateaux sur
le Mékong... Bien sûr il y aussi des hommes assis devant
leur demeure, des femmes actives et des enfants nus. Toute
la vie de la campagne... Nous pourrions nager en plein
bucolisme si ce havre de paix n’était perturbé par les
cris d’orfraie et de vierges effarouchée que pousse un
ancien édile de l’Outre-Forêts au fond de son minibus.
Même
les plus mauvaises pistes ont une fin et nous finissons par
arriver à la fameuse Pagode au Cent Colonnes. Comme vous
étiez tous suspendus aux lèvres de Vivoinn je ne
reviendrais pas sur ce monument de l’art bouddhique.
Le
retour est tout aussi épique voire plus en raison de la
nuit qui tombe. Un léger brouillard de fumée bleutée s’étiole
dans la bise au-dessus des maisons. Des odeurs aussi (pour
ceux qui voyagent nez au vent). Des miscellanées d’effluves
doucereuses, putrides , sucrées et âpres musardent le long
de la piste.
C’est
les reins brisés et les sacrums raccourcis que nous prenons
le repas du soir.
Nuit à l’Hôtel SANTEHEAP
J
4
KRATIE - KOMPONG CHAM
05/11/2001
Pensée
du jour:
« C’est
quand il y a un temps mort qu’il faut tuer le temps. Paradoxal non ?
»
Réveil
6h. Nous sommes toujours en vacances !! Nous prenons la
même route (??) avec déjà quelques défections.
A
bord de pirogues à longues queues nous assistons aux ébats
des Orcagilla brevirostris ou paa khao en lao ou plus
simplement les dauphins Irrawaddy. Ces mammifères d’eau
douce d’environ 2-3 m au front bombé seraient les
réincarnations d’êtres humains.
Nous
rejoignons ceux qui ont fait la grasse matinée ( leurs noms
seront tenus secret ) pour un petit déjeuner en commun
avant de lever l’ancre à bord du Royal, autre fleuron de
la marine locale.
Nous
débarquons à KOMPONG CHAM . Autrefois prospère cette
petite ville coloniale s’organise autour d’un marché
central. Elle est célèbre pour ses cultures d’hévéa,
de coton et de tabac mais aussi pour ses filles réputées
fort jolies. Dans la région sont fabriquées des poteries
domestiques qui se font sans tour et sans four.
Ici
le Borasses flabellifer alias palmiers à sucre ou THNOT en
khmer ponctue le paysage végétal. Au coucher du soleil
quand les rizières sont en eau il transforme le paysage en
véritable cathédrale de lumière.
Traditionnel
repas en ville avant de nous rendre par un chemin à travers
les rizières vers le VAT NOKOR , la « pagode de la
ville », qui s’élève au lieu-dit PHOM BACHEY, la
« hauteur de la grande victoire », qui est en fait un
monticule dans un paysage plat. Ce sanctuaire
pré-angkorien, en grès et latérite, possède une tour
centrale en forme de stupa. Pour le reste souvenez-vous des
explications de votre guide préférée.
Nous
reprenons notre bus pour gravir la colline des hommes, PHNOM
SREI, qui fait face à la colline des femmes, PHNOM PREY.
Cette dernière est plus haute grâce à une fourberie
typiquement féminine. Mais juste retour des choses, elle
est peu fréquentée. Chemin faisant un directeur de chorale
paroissiale nous chante l’épopée du fameux Constantin
dont la mégalie brachiale autorisait des perfomances que
rigoureusement mon épouse m’interdit de répéter ici.
Nuit à l’Hôtel MEKONG
J5
KOMPONG CHAM - KOMPONG
THOM
06/11/2001
Pensée
du jour :
«
L’avenir me fait peur. Je lui tourne le dos et il est
toujours devant moi »
Nous
traversons les campagnes qui restent plongées dans les
oubliettes du temps. La route nationale est une fondrière.
Ici le temps s’est arrêté : maisons en bois sur pilotis
derrière des mares ponctuées de lotus, charrettes à bœufs,
buffles vautrés dans la boue, poules et poussins traversent
la chaussée , élégantes écolières à vélo...
Et
partout on pêche, une pêche miraculeuse, à la ligne, à l’épervier,
à la nasse...
Au-delà
des arbres et des maisons s’étend la plaine, toute
illuminée de soleil, et comme vitrifiée. Et partout les
thnots avec leurs cimes charnues, si caractéristiques. A
cette distance on dirait des clous de tapissier. A leurs
pieds les rizières à sec forment un patchwork aux tons
sableux, ocres ou calcaires. Paysage immense tremblant comme
un mirage. Tout un symbole ces palmiers. Au Cambodge le
thnot c’est la vie, presque autant que le riz. Les Khmers
ont appris à en tirer tant de bonnes choses... Troncs et
palmes servent à la construction des maisons. Les fruits
sont mangés mûrs ou en patisserie. Leur noyau produit un
médicament qui soigne la conjonctivite. Les fleurs
incisées produisent une sève foncée qui du sucre après
ébullition. Le jus fermenté se transforme en vinaigre ou
en alcool au choix . Avec les tiges on fait des fibres et
des cordes... Une forêt de thnots fait vivre un village
entier. Il y a là aussi des aréquiers, kaokiers, des
manguiers, des jacquiers... Dans l’ombre de leurs branches
brillent des fruits gorgés d’eau et de sucre, les
papayes, les goyaves , les dorions, les caramboles, les
biltis, les ramboutans, les mangoustans. On distingue les
bananiers couleur pomme verte et toutes les cultures qui
font l’ordinaire des paysans khmers. La canne à sucre, le
coton, les patates douces, le maïs, le tabac, le sésame,
les arachides. Le manioc qu’il faudra râper, tremper dans
l’eau et pétrir pour le rendre comestible. Ou la
cardamome, dont la graine facilite la digestion, parfume l’haleine
et fortifie les jeunes accouchées.
On
croise d’incroyables charrettes antiques attelées à une
paire de buffles. De temps à autre des chevaux de petite
taille traînant d’énormes carrioles que les paysans ont
chargées à ras bord de légumes. Les animaux sont
harnachés; comme au cirque d’un collier surmonté de
pompons multicolores et de clochettes s’agitant au rythme
du trot. Ce sont les couleurs vives que les Cambodgiens
voudraient enfin retrouver et apprendre à leurs enfants. De
nombreux canaux, lagunes et rivières languissent
paresseusement parmi les rizières, entre les cocotiers et
les palmiers.
A
SKUOP nous faisons comme les autochtones un arrêt pour
déguster la spécialité locale : la mygale frite qui se
consomme comme un crabe en cassant la carapace. Petit en-cas
pour le moins exotique.
Encore
un arrêt avant le déjeuner : la visite du VAT PRADASH UM
PRADASH .
Puis
à une trentaine km de Kompong Thom nous nous arrêtons à
SAMBOR PREI KUK, le plus remarquable des sites
pré-angkoriens, facilement accessible par une piste en
latérite toute neuve. C’est la première capitale de la
civilisation khmère à son apogéesous Içanavarnam 1er
( 615-635 ). Cinquante prasats, parfois délabrés,
parsèment une forêt clairsemée qui bruit sous le cri des
oiseaux siffleurs. Une cité oubliée et merveilleusement
préservée. Le silence de la forêt envoûte et oppresse
tout à la fois. On pénètre dans le livre de la jungle.
Baghera n’est pas loin et Sher kahn rôde. Les racines
aériennes de ficus étrangleurs engloutissent les pierres
et les tours en briques rouges ornées de magnifiques
sculpture d’inspiration indienne. Parfois des formes se
dissimulent dans les motifs usés particulièrement
émouvants: là un visage humain ; ici un minuscule cheval
ailé. Au coeur de cette cité est née la « vénus
cambodgienne », célèbre statue de la Durga, aux courbes
si parfaites, qui témoigne du début de l’art khmer.
Un
dernier arrêt au pont d’Angkor avant d’arriver à
KOMPONG THOM, charmante bourgade en plein fief khmer rouge.
Nuit à l’Hôtel SAMBOR PREI KUK
J
6
KOMPONG THOM - SIEM
REAP
07/11/2001
Pensée
du jour :
« Il
n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. C’est
mon avis.
Et
je vois pas pourquoi j’en changerais »
Nous
prenons possession des 4x4 dès l’aurore pour nous engager
sur la fameuse N6 et parcourir les 157 km qui nous séparent
de SIEM REAP.
A
droite et à gauche de la route on retrouve les mêmes
paysages que les jours précédents: maisons de bois sur
pilotis entourées d’étangs, de lotus et de cocotiers
dans un décor de rizières. Quelques temples aux toits
vernissés vers lesquels se dirigent des enfants en
chemisettes blanches. Là un arbre du voyageur qui
dresse une main amicale doigts écartés et quelques
bananiers à l’oreille basse ( il s’agit là de
métaphores !)
Si
les accotements sont bucoliques il n’en est pas de même
de la chaussée. Nids de poules succédant à des
fondrières, pans de route emportés par des flots
impétueux obligeant des passages de gué. Chacun avance
comme il peut, seul ou avec l’aide d’un tracteur ou d’un
compagnon de route. Ici la solidarité est obligatoire sinon
on reste sur place. Sur ce parcours dantesque de petits
malins ont installé des zones à péage aux endroits les
plus scabreux. La solidarité à l’instar de la santé n’a
pas de prix !
Nous
arrivons sans encombres et ravis à SIEM REAP en début d’après-midi.
Après la prise d’un repas bien mérité les uns prennent
du repos, d’autres partent à la découverte de la ville
et il y en a même un qui va se faire « masser » dans
un établissement spécialisé. Rassures-toi François nous
ne te dénoncerons pas ).
SIEM
REAP, le « massacre des Siamois », est une
paisible cité dont l’activité entière tourne autour des
flux touristiques provoqués par la proximité des temples d’Angkor.
On trouve pêle-mêle des galeries d’art proposant des
effigies d’apsaras et autres sculptures angkoriennes, des
restaurants et une myriade d’hôtels pour tous les goûts,
des maisons individuelles transformées en guest-house. On
mise aussi sur la tourisme de luxe à l’image du «
Grand Hôtel d’Angkor », un vieux palace français
des années vingt restauré à grand frais et qui tranche de
façon provocante avec les façades lépreuses du quartier
central où s’entasse une population miséreuse attirée
par cette manne financière.
Le
nouveau marché, PSAR TELA, est un grand carré installé
dans l’ancien quartier français. Il abrite des étals d’objets
domestiques, de vêtements, de bijoux en toc, de livres,
de cartes postales... Mais on y trouve aussi des poissons
terreux du fleuve encore frétillants, des beignets de
bananes ou des oeufs de fourmis, le caviar laotien.
A
la tombée de la nuit le long des rives du canal
aménagées pour la flânerie, des réverbères tout droit
sortis des vieux quais parisiens, mais en pierre ceux-là,
éclairent les passants. Devant la poste est accrochée
une vieille boite aux lettres jaune de l’époque
coloniale annonçant fièrement que la 3ème levée à
été faite il y bien longtemps.
Nuit à l’Hôtel ANGKOR
J
7
SIEM REAP
08/11/2001
Pensée du jour :
« Dans
le passé j’avais plus d’avenir que maintenant. »
Grand
jour aujourd’hui : la visite des temples d’ANGKOR.
Antoinette
et François arrivent en retard. La première parce qu ’elle
a surveillé les geckos toute la nuit et l’autre mal remis
des massages de la veille! Un bonheur n’étant jamais
parfait Chhorvivoinn nous laisse entre les mains de
« Youpi » (??), le guide local.
ANGKOR
! Deux syllabes qui font rêver et dont la finale ouverte
invite à la découverte . Nous voici donc à l’est du
grand lac TONLE SAP vers le 14ème ° de latitude et
le 102ème° de longitude à l’orient de Paris où se
trouvent ces ruines qui vous transportent comme par
enchantement de la barbarie à la civilisation, des
ténèbres à la lumière.
« Voici
donc ces temples qui apparurent si longtemps à notre
imagination comme de fabuleuses visions. »
Claude FARRERE ( L’Illustration 1931)
A
l’instar d’Henri MOUHOT qui « retrouva »
Angkor en cherchant des insectes inconnus en 1858 nous nous
écrions : « Ah, que n’ai-je la plume d’un
Chateaubriand ou d’un Lamartine, ou le pinceau d’un
Claude Lorrain, pour faire connaître aux amis des arts
combien sont belles ces ruines.. »
Tant
d’autres écrivains ou aventuriers nous ont laissé leurs
impressions.
Roland
Meyer très lyrique: « Du ciel seul a pu tomber sur
la terre Angkor, prodigieux fragment des royaumes
stellaires.. ».
Dramaturgique,
Paul Claudel : « Angkor est bien un de ces endroits
maudits, le plus maléfique que je connaisse. J’en étais
revenu malade et la relation que j’avais faite de mon
voyage a péri dans un incendie.. ».
Je
salue la perfection, écrivait Tcheou Ta Kouan dans la très
vivante relation qu’il fait du séjour qu’il passa en
1296 dans l’antique capitale khmère.
Un
romancier français aux prunelles d’encre, ancien ministre
de la culture, donna ces lettres d’aventure, un frisson de
romantisme avec ses descriptions d’une jungle glauque ,
habitée de pierres moussues. Lui qui aima Angkor au-delà
du raisonnable souhaitait « jeter son imagination
contre ces capitales de poussière, de lianes et de tours à
visages. »
Angkor,
symbole d’un peuple, symbole d’un art. Alors même qu’à
Paris la Sorbonne et Notre-Dame rayonnent de leurs propres
feux les rois-dieux du Cambodge achèvent au cœur de leur
empire une métropole de pierres et d’eau. Ville fossile
posée sur les rives du Tonlé Sap comme une énigme, Angkor
fût un jour la capitale du Cambodge. Non le pays déchiré,
meurtri, que nous connaissons mais l’état théocratique
édifié par les Khmers, qui jusqu’au 13ème siècle , s’étendait
sur la quasi totalité de la péninsule indochinoise jusqu’en
Malaisie. A la manière des anciens romains, pour lesquels
Rome était la « cité universelle », les
Khmers ont attribué un surnom à leur capitale : NAGARA, la
ville en langue sanscrite.
Nous
prenons le chemin bordé de grands arbres qui pénètrent
dans l’enceinte de l’ancienne cité d’ANGKOR THOM par
la porte sud. Tout de suite une vue merveilleuse : un pont
qui enjambe les douves y est escorté par une double rangée
de 54 statues de pierre. Ce sont les géants et les gardiens
de la ville qui tient sur un serpent à neuf têtes
évoquant le « barattage de l’océan de lait». L’élégante
porte est faite d’un arche s’appuyant sur des
éléphants stylisés et est couronnée de quatre grandes
têtes dirigées vers les points cardinaux. En la passant on
pénètre dans le monde khmer rempli de mystère et de
grandeur.
De l’autre côté de la porte s’étend un
magnifique parc, où quelques vestiges de pierre percent par
endroits ce tapis de grands arbres. Nous nous retrouvons
devant un imposant amas de pierres noires, intrigant...
Quelques secondes plus tard, un rayon de soleil éclaire les
ruines et comme par enchantement, de grands visages aux
sourires énigmatiques et aux regards vides, un peu
inquiétants apparaissent de tous côtés sur les
différentes terrasses du sanctuaire. Magique !
Nous
sommes au BAYON, la « montagne magique ».
Le
Bayon avec sa forêt de tours se projetant aux quatre points
cardinaux. En levant la tête vers celles qui vous
surplombent, noyées de verdure, un pâle sourire vous tombe
dessus et puis un autre sourire encore là-bas sur un autre
pan de mur et trois et puis cinq et puis dix ; il y en a
partout et l’on se sent surveillé de toute part. Où que
vous soyez il y a toujours un visage insolite qui vous
observe. On se sent pénétré par le sourire de ces
déités aux yeux d’amandes, aux nez épatés, aux lèvres
gourmandes joliment ourlées avec on ne sait quelle
féminité caduque. On se sent dominé, poursuivi et leur
expression d’apaisante sérénité ne nous rassure pas
vraiment.
Si
ANGKOR VAT figure l’idéal khmer classique le BAYON est un
peu son répondant gothique. Il comporte trois niveaux de
terrasses que l’on atteint par des couloirs méandreux, un
labyrinthe de galeries obscures encombrées de piliers qui
semblent avoir poussé par touffes. Des bas-reliefs d’un
réalisme caricatural qui fait songer à Bruegel, y
dépeignent avec humour et insolence les choses les plus
triviales de la vie khmère: combats de coqs et parieurs,
ascètes essayant d’arracher le sarong d’une jeune
fille, homme s’épilant la barbe devant un éclat de
miroir... On voit même de jeunes Cambodgiens occupés à
abuser trois chinois sur la place du marché, l’un
faussant la balance en y posant furtivement un doigt.
Les
paysans transportent toujours leur marchandises dans des
paniers, les pêcheurs jettent leurs filets lestés avec la
même féconde habilité. Les femmes dans de petites
embarcations continuent à cueillir des boutons de lotus
dans les douves et les étangs qui entourent les monuments d’Angkor.
Comme si elles étaient en relief dans l’eau. Ces images
ont été reproduites sur les murs séculaires du Bayon. Ces
sculptures de montrent des scènes de la vie quotidienne qui
sont les mêmes que celles d’aujourd’hui. La vie
majestueuse et raffinée a disparu depuis longtemps d’Angkor
mais le rituel millénaire de la campagne continue de se
dérouler dans l’ombre des temples .
Plus
loin nous rejoignons l’enceinte royale et le
PHIMEANAKAS, le « palais céleste », et le
BAPHUON représentation pyramidale du Mont Meru. Du palais
royal il ne reste plus grand chose mais les lions gardiens
ont subsisté à chaque coin des terrasses. L’endroit est
calme et bucolique . Près du grand bassin des enfants
jouent et font paître leurs vaches. La TERRASSE DES
ELEPHANTS était utilisée par le roi et la cour pour
assister aux défilés et autres grandioses manifestations
qui avaient lieu sur la place royale. Le mur qui soutient la
terrasse est décoré sur toute sa longueur de bas-reliefs
représentant des éléphants, des lions, des garudas, d’un
cheval à cinq têtes et des scènes de chasse .
LA
TERRASSE DU LEPREUX beaucoup plus petite que la précédente
à la forme d’une croix et certains historiens pensent qu’elle
servait aux crémations royales. Hormis les légendes qui
circulent à son sujet on ne sait rien ou presque de ce roi
« lépreux » dont la statue sur les terrasses n’est
qu’une copie. Les murs de soutènement sont ornés de
sculptures de personnages assis : apsaras, rois ,
princesses...
Au
bout du chemin aux pierres déchaussées TA PROHM, l’antique
temple résiste vaillamment aux outrages du temps et à l’attaque
tentaculaire des immenses banians , fromagers et
ficus.
Un
jour sinistre les blocs de pierre taillées se sont
éboulés dans un grand chaos avant de se figer pour l’éternité.
Nous franchissons une porte en espérant que le lourd
linteau dangereusement penché attende encore un peu avant
de s’écrouler. Il est joliment sculpté d’une scène de
la vie quotidienne rappelant une époque révolue. Le temple
semble mort étouffé dans les griffes de la nature comme le
fût LAOCOÖN dans la mythologie grecque. L’effet parait
surréaliste, donnant l’apparence d’une forme
déformée, métaphore à la Salvadore Dali de la
persistance de la mémoire.
Nous
pénétrons doucement dans une large coursive voûtée
desservant des salles effondrées envahies de racines. Il
règne dans ce temple inquiétant, où le moindre bruit
résonne, une étonnante fraîcheur. Dans ce chaos minéral,
contre les murs restés debout, les apsaras dansent. Leurs
mains sont gracieusement relevées comme des accents vers le
ciel. Et comme si l’extrême beauté de leurs corps ne
pouvait supporter la grossièreté d’un autre vêtement
que le pagne, les apsaras ne sont vêtues que de bijoux :
elles en portent autour du cou, aux chevilles et aux
poignets et sont coiffées de hauts diadèmes et de tiares.
Elles offrent encore à l’homme qui passe la vision de
leurs seins lourds au galbe de mangue, la douce courbure de
leurs corps, leur taille fine et leur délicate gaucherie
qui émane de leurs cuisses écartées à la façon des
grenouilles . Elles ont survécu aux amants de chair qui les
ont taillées dans la pierre avec amour et ferveur. Ces
esclaves ne savaient pas qu’ils étaient des artistes
épris de la femme idéale émergeant de l’ombre comme
pour dire : « Voila ce qui ne meurt jamais : la
Beauté. A présent des racines vicieuses et diaboliques s’insèrent
entre leurs jambes, balafrant leurs visages. Les danseuses
khmères ne peuvent pas échapper à l’impitoyable
invasion de la forêt. Mais elles continuent malgré tout de
sourire depuis maintenant mille ans pour conjuguer les
maléfices et apprivoiser le temps. Qui dira ce que sont
devenues les cendres des belles sur qui furent copiés ces
torses parfaits?
Il
est temps de revenir aux dures réalités du
quotidien.
Nous
allons donc déjeuner avant la visite tant attendue d’ANGKOR
VAT.
« Il
n’y a rien au monde comme Angkor, les monuments grecs et
les cathédrales
parlent à l’intelligence. Angkor touche ta peau, ton
sang. Angkor se respire autant qu’il se voit. »
Loup DURAND ( Jaraï )
Voici
donc la chaussée triomphale pavée de dalles disjointes et
gardée par quelques nâgas menaçants, ces divinités
serpentines à sept têtes. Et nous voici marchant vers le
temple de grès couronné de ses cinq tiares aux allures
pontificales.
S’avancer.
Marcher
d’un pas respectueux et hésitant comme on hésite à
s ’approcher d’un mythe. L’eau stagnante des
douves, que tache le bleu crémeux des nénuphars, les
palmiers à sucre hissés sur leurs pattes au milieu du
gazon indien vert acide comme des curieux attendant un
cortège. Une vache agite sa queue avec irrévérence devant
le décor ancestral.
Le
temple est noir, un noir sans nuances accentué par le bleu
du ciel et les variations de verts de la savane , des
eucalyptus, des tamariniers, des banians et des manguiers.
Enfin
la masse.
Le
temple est immense. Il s’étale sur toute la largeur du
paysage. Dans ce trésor architectural la patience, la force
et le génie de l’homme se sont superposés pour confondre
l’imagination. Partout ce ne sont que terrasses, arcades,
esplanades, enfilades, portails, embarcadères, escaliers,
linteaux, corridors, assises, galeries ou dômes. Et tout
cela est lancéolé, flammé, géùiné, anché, brodé,
tiériculé, fasciculé, denticulé, réticulé, auréolé,
festonné, polylobé, chantourné, écroulé, fissuré,
ébréché, cassé ou affaissé .
A
la fin il se mêle à l’admiration que l’on éprouve
pour ces richesses, un profond sentiment de tristesse. La
crainte que ces merveilles, chef-d’œuvre du génie humain
ne puisse révéler le secret qu’il renferme avant sa
destruction complète. « Le temps aux plus belles
choses se plait à faire un affront. » et le temps attaque
les monuments khmers. L’eau tout comme Shiva est à la
fois source de création et de destruction. Elle arrose la
plaine où pousse le riz et apporte leur nourriture aux
poissons des lacs et des rivières. Elle peut également
déployer une force incomparable, emportant tout sur son
passage. L’ancienne civilisation khmère construisit
canaux et réservoirs, douves et bassins qui apprivoisèrent
le débit. Angkor est un empire né de l’eau et quand les
canaux et les réservoirs ne furent plus entretenus l’eau
de nouveau débridée a infiltré et sapé sa gloire plus
que les arbres et la cupidité des hommes.
Dernier
effort de la journée: la montée au sommet du PHOM BAKHENG
par un escalier disjoint pour les plus courageux. D’autres
se prenant pour des Indiana Jones le grimpent à dos d’éléphant.
Les pachydermes avec leur air bonhomme d’auxiliaire
indispensable et de supériorité bienveillante avance d’un
pas lourd avec leur indicible chargement.
Sur
le sommet la foule silencieuse attend le mythique coucher de
soleil sur le temple funéraire de SURYAVAMAN II. Une fois
encore le rendez-vous est manqué . Que font les agences ?
Dîner
en ville avec danses issues du folklore khmer. Où sont les
devatas et les apsaras ??
Nuit à l’Hôtel ANGKOR
J
8
SIEM REAP -
PHNOM PENH -
VIENTIANE
09/11/2001
Pensée
du jour :
« Pour
avoir de l’argent devant soi il faut le mettre de
côté »
Réveil
5 heures ! C’est toujours les vacances.
Nous
nous envolons vers Phnom Penh et Chhorvivoinn dont l’absence
pèse cruellement. Nous survolons le TONLE SAP que les
khmers désignent sous le nom de TENK DEI ,
eau-terre ». Ce grand lac dont Mouhot comparait la
forme étranglée à celle d’un violon, présente des
caractéristiques uniques au monde. A la hauteur de Phom
Penh, le bras qui prolonge le lac ( le manche du violon pour
ceux qui suivent ) rejoint le Mékong et épouse son
activité. Ainsi pendant la majeure partie de l’année le
Tonlé Sap se vide et le défluent apporte son eau au
Mékong se dirigeant d’amont en aval ( vous suivez
toujours ? ). Pendant la mousson au contraire il sert de
déversoir aux torrents gonflant le fleuve et sa circulation
s’inverse. Ai-je été clair ? Selon les années il peut
quadrupler sa surface entre juin et octobre. La forêt
inondée permet le frai d’une variété considérable de
poissons, dont certaines espèces très rares et
recherchées telle le TREY MIECH ou poisson royal pouvant
peser jusqu’à 25 kg. Et comme disent les Cambodgiens:
« Mien trek, mien trey » ( où il y a de l’eau il
y a du poisson .)
Cette
digression nous permet de nous poser à Phnom Penh
illuminée par les « six lumières ». Cette ville en
a bien besoin car on ne compte pas le nombre de fois où
elle a été détruite, abandonnée et « refondée ».
Ses habitants s’en allèrent de force un matin d’avril
1975 sans connaître leur destination. Pendant quatre ans la
ville fût « noire et rouge », noire du vide
et rouge des fleurs de flamboyant et du sang répandus sur
le sol.
Aujourd’hui
nous retrouvons notre pas d’occidental pressé pour faire
les visites prévues. Nous commençons par le PALAIS ROYAL.
A l’écart de la rive du fleuve ( le Mékong pour ceux qui
ne savent toujours pas ) les vastes quartiers du roi Norodom
Sihanouk forment un clairière dans cette ville encombrée.
Jardins à la française soigneusement entretenus par des
jardiniers silencieux, cours spacieuses et pavées, statues
équestres des princes cambodgiens... Il s’agit en
réalité d’un vaste ensemble composé de nombreuses
pagodes peintes en jaune, la couleur royale, derrière un
mur décoré de fresques représentant des épisodes du
Ramayana. De l’extérieur ses hautes tours pointues font
penser au VAT PHA KHEO de Bangkok mais on constate assez
vite qu’il est loin d’être aussi somptueux.. Ce palais
est en fait un ensemble de constructions aussi
hétéroclites que la porte de la Victoire, le Phon Mondav,
la salle du trône, le palais Kermain, la superbe Pagode d’argent
ou l’étrange pavillon gris foncé construit sur l’ordre
de Napoléon III à Ismaëli à l’occasion de l’inauguration
du canal de Suez, afin d’y accueillir l’impératrice Eugénie. Celle-ci en fît cadeau au roi
Norodom en 1870.
Nous
courrons toujours derrière Vivionn afin de voir un maximum de
choses au MUSEE NATIONAL qui abrite sous son pourpre terni
par la pluie ravageuse l’âme d’Angkor.. Le jardin
intérieur avec ses quatre bassins de nénuphars inspiré
des temples khmers est ponctué en son centre par la belle
statue du ROI LEPREUX. « IL y a au mois une statue
aussi belle que tout ce que les mayas ont jamais taillé
dans la pierre... » W. SOMMERSET MAUGHAM ( Un
gentleman en Asie ).
Seule
vie dans ce silence le bruissement soyeux des milliers de
chauve-souris abritées dans les doubles-plafonds.
Nous
déjeunons à 10h30 !! Le temps presse, notre
avion et le Laos nous attendent. Le restaurant se situe
près du PSAR THMAY ou marché central, étrange bâtiment
art-déco construit par les Français. Il évoque une base
lunaire avec une grande sphère centrale et quatre
tentacules qui s’étendent vers chaque côté de la ville.
Sa coupole jaune écaillée et couverte de traînées noires
- humidité oblige - abrite autant de secteur qu’il existe
de type de marchandises. La circulation autour est
impressionnante car c’est jour férié aujourd’hui: des
mobylettes, des vélos, des cyclo-pousse, des motos, des
voitures dont certaines avec la conduite à droite, de vieux
camions russes, chinois, allemands, japonais...
Les
aéroports, comme les quais de gare, donnent souvent lieu à
des scènes déchirantes. A Phnom Penh c’est le cas. Il
nous faut laisser la « Jeune Fille aux six lumières
» qui a éclairé notre séjour chez les Khmers.
Chhorvivvoinn restera dans nos cœurs car pour nous elle est
ce Cambodge meurtri qui se relève pour un avenir plus
souriant.
Un
petit vol et nous voila au LAOS, au pays « du
million d’éléphants » où il n’y en a plus guère,
dans la République Démocratique Populaire Lao (tout un
programme !!). Nous sommes en 2543 dans un pays sans villes. A peine débarqué on met pied sans le savoir dans la
capitale VENTIANE. Tout juste un gros bourg où voitures et
chars à bœufs cohabitent aujourd’hui sur cinq routes qui
s’entrecroisent sur la place NAN PHU, la place de la
fontaine. Là en plein après-midi pas un passant pressé,
pas une voiture folle... Nous sommes au pays du grand
sommeil, au pays de la belle au bois dormant, au cœur de l’
envoûtante Indochine oubliée des bords du Mékong. Pour
entrer dans le décor on se doit d’apprendre à respirer
lentement, à écouter, à regarder autrement. On se doit
aussi de connaître l’insouciance, d’oublier ses
repères. Pour suivre le rythme local il faut s’accorder
un peu de farniente entre deux siestes en attendant de se
coucher le soir. Pourtant notre guide Kah MOUN nous dit qu’il
y a plein de boites « de nouilles » (?) à Ventiane .
La plus lilliputienne des capitales de la région a des
allures de sous-préfecture poussiéreuse.
Kah
Moun s’avère très disert et en un rien de temps nous
connaissons tout de la situation géopolitique de son pays :
le Laos est un grand exportateur d’électricité, il est
limitrophe de la Thaïlande située sur l’autre rive du
Mékong, il possède des industries variées et nombreuses
et de belles maisons à louer. Et comble de raffinement les
femmes laos savent faire la cuisine épicée ( pour les
occupants du fond du bus ).
Notre
guide ne résiste pas à l’envie de nous faire admirer le
fleuron de la république populaire : le PONT DE L’AMITIE,
ouvrage d’art qui franchit le Mékong pour rejoindre la
Thaïlande qui scintille de mille feux sur l’autre rive .
Je vous rappelle que le Siam se trouve en face !!
Autre
haut lieu culturel de Ventiane dont la visite ne souffrira d’aucun
retard : le fameux « JARDIN DES BOUDDHAS », une
espèce de mandarom revisité par le facteur Cheval.
Délirant et kitsch !
Nuit au NOVOTEL
J
9
VIENTIANE - LUANG PRABANG
10/11/2001
Pensée
du jour :
« Brûler
un feu ? Comme si on disait mouiller de l’eau . »
"
SABA DEE ! "
Un
saut de puce matinal nous amène de Ventiane à
LUANG PRABANG. Entre l’aéroport et la ville nous
apprenons :
1)
que les Laos « ont finit les rois » en 1975
2)
qu’ici aussi il y a des maisons à louer
3)
que de l’autre côté du Mékong c’est le Laos;
nous nageons en pleine confusion !
4)
il y a quinze minutes nous étions à un quart d’heure de
Luang Prabang
LUANG
PRABANG, l’ancienne capitale royale, inscrite au
patrimoine mondial de l’Unesco, la cité du bouddha d’or
est le saint siège de l’autorité bouddhique. Quand
Francis Garnier y pénètre en 1867 il est frappé par la
richesse du lieu qui détonne avec le reste du pays:
« Nous n’avions pas rencontré une agglomération
aussi considérable de maisons avec au milieu ce palais du
roi adossé à un escalier de plusieurs centaines de marches
conduisant à la pyramide sacrée des Laotiens ». Luang
Prabang, encore appelée la cité des flamboyants,
est lovée à l’endroit où la rivière NAM KAHN
rejoint les eaux plus larges du Mékong. Elle reste une
petite ville paisible et l’architecture y marie le style
traditionnel hérité des siècles passés avec les vestiges
du protectorat français, petits palais croquignolets à la
thaïlandaise, demeures laotiennes en bois sur pilotis,
maisons en tunnel d’inspiration chinoise à la décoration
kitsch, baraque de planches et de tôle, maisonnettes à
vérandas, arcades et portiques...
A
tout seigneur tout honneur nous commençons notre
visite par le VAT THAT LUANG, le monument le plus important
du Laos de son vrai nom « le divin reliquaire »,
« sommet précieux du monde », où il y aurait un
morceau d’os iliaque ( ou un cheveu ) au coeur de l’édifice
. Gérard ( déjà ) VAN WUYSTOFF reçu en 1641 par le roi
VONGSA fût impressionné par l’énorme pyramide dont le
sommet était couvert de feuilles d’or pesant mille
livres. ». Dans la salle de classe de la bonzerie
Gérard M . a du mal à assurer un cours élémentaire
alors qu’il émarge à l’indice 1720 dans le grand livre
de l’ état!!
Nous
prenons possession de notre hôtel, ancienne résidence
princière, où nous attend notre premier repas lao.
Il
y eut jadis à Luang Prabang une soixantaine de Vats (
monastères ). Il n’en reste que la moitié, des temples
sans ostentations mais d’une gracieuse élégance se
nichant parmi les palmiers et les bougainvilliers. C’est
dire la tâche qui nous attend.
Nous
démarrons l’après-midi avec le VAT SENE SOUKARAM couvert
de tuiles rouges et jaunes à la thaïlandaise. Sa
toiture à trois pans semble vouloir harponner le
firmament de leurs angles cornus. Leurs pointes acérées
ont pour fonction d’empaler les mauvais esprits qui
tombent du ciel. Au sommet des toits de fines clochettes
fixées sur une corde comme des pinces à linge
tintannabulent à la moindre brise. Il s’agit de tenir les
bons génies éveillés.
Puis
nous rendons au VAT XIEN THONG le plus riche de tous les
temples . Un véritable havre de paix dans la ville . Tout
est délicatesse et raffinement dans les décors des
différents édifices. Les toits pointus à pans multiples
campent une invraisemblable composition architecturale et
viennent presque lécher le sol tant ils descendent bas. Les
virgules qui tendent leurs extrémités vers le ciel
réussissent à alléger cette pesanteur. C’est le temple
royal. Très bien entretenu parce qu’il fût, dès sa
construction en 1540, patronné par le roi. On y découvre
de très belles mosaïques dont un arbre de vie et des
peintures murales.
Après
le plus beau c’est au tour du plus ancien : le VAT VISOUN
PARATH. Ses fenêtres à balustres rappellent Angkor et son
stupa a une forme de lotus ( pastèque disent les mauvaises
langues ).
Après
tout ce spirituel nous plongeons dans le matériel : le
marché central et le marché Hmong. Première épidémie de
fièvre acheteuse ! La rue rejette comme une crue indigeste
des parterres de pioches, de survêtements chinois, d’agrumes
jusqu’aux tables tapissées de billet de loterie .
Derrière les balances à bascule les petites marchandes
patientent chasse-mouches à la main .
Concert
dînatoire à l’hôtel en l’honneur d’un mélomane de
l’Outre-Forêt. Les craquètements d’oiseau des
instruments à lames, le grondement des tambours à peau de
buffle, le fracas de verre brisé des petites cymbales de
cuivre et le crissement des cordes nous réjouissent l’âme
et subjuguent Gérard M.
Nuit
à l’Hôtel SOUVANNAPHOUM
.
J
10
PAK OU
11/11/2001
Pensée
du jour :
«
Une voiture normale a deux roues à l’avant, deux roues à l’arrière,
deux roues à gauche et deux roues à droite.
Vous
pouvez vérifier. »
Au
petit matin la ville se réveille. On entend le froissement
des balais de branchage sur les parvis des monastères. En
longue file rouge-orange les bonzes à l’épaule nue
déambulent au travers des quartiers selon un dessin
immuable, quêtant dans un vase de cuivre l’obole en riz
gluant des femmes agenouillées. Ils frôlent le sol sans
aucun bruit et s’éloignent comme ils sont venus. Et comme
les fidèles on est naturellement imprégné de cette
atmosphère religieuse. Il est des cités que des siècles d’épreuves
ont préservées des soubresauts du monde et où triomphe le
rythme calme de la vie. Mais pour combien de temps encore?
Le visiteur pressé n’a pas sa place ici. Toute
précipitation serait un contresens. Il faut se laisser
porter par la ville.
La
sortie d’aujourd’hui doit nous mener au village de BAN
XAN HAI, le village des jarres et aux grottes de PAK
OU.
Pour
ce faire nous prenons un bateau pour remonter le Mékong (
le fameux fleuve en face du Laos ). Durant la navigation
nous avons tout le temps pour admirer les potagers en
terrasses taillées dans le limon déposé lors de la
dernière mousson. Les un(e)s bavardent (toujours les mêmes
), les autres dorment (toujours les mêmes aussi ), d’autres
enfin, bercé par la magie du fleuve, deviennent lyriques :
«
Se pencher sur le fleuve, qui est de temps et d’eau
Et
penser que le temps à son tour est un fleuve
Puisque
nous nous perdons comme se perd le fleuve
Et
que passe un visage autant que passe l’eau . »
Avec
tout cela nous voici rendu à BAN XAN HAI. Ici les
bouillleurs de cru font fermenter le riz gluant dans de
grandes jarres; ils obtiennent ainsi un vin doux, le LAO
KHAM KHAM, qu’ils distillent pour faire le LAO LAO, alcool
plus près du pétrole lampant que d’une bonne mirabelle.
Les villageois profitent de notre arrêt pour vendre leur
artisanat local.
Prochaine
escale: les grottes de PAK OU creusées dans un relief
karstique. C’est jurassique parc. Une fantasmagorie de
centaines de bouddhas plantés là comme des stalagmites
sacrées. En contrebas au confluent du Mékong et du
Nam, quelques femmes orpaillent à la recherche d’une
improbable fortune.
Après
un sympathique pique-nique entre les deux grottes THAM TING
et THAM PHUOM notre esquif nous ramène en ville où nous
reprenons le bus pour BAN XIENG, un village de tisserands et
de fabricants de papier. Toujours le matériel après le
spirituel !
La
vie du groupe s’organise. Au fond du bus ce ne sont que
gaudrioles, calambours, billevesées et autres
contrepèteries. Affligeant ! Rassures-toi Roger, tu ne
seras pas dénoncé. Antoinette surveille toujours les
geckos et autres rampants. Etonnant ! Marie-Brigitte
entraîne des hommes mariés et grand-pères de surcroît
pour leur montrer « sa petite noix d’arec ». Choquant !
Les deux Jacqueline discutent chiffons. L’une prétendant
que le sien est plus long et l’autre insinuant que le sien
est moins court. Surréaliste !
Monter
le soir au sommet du MONT PHOUSI, regarder les derniers
rayons du soleil déclinant disparaître derrière les
montagnes et contempler, en contrebas , la paisible
agitation des temples, garder les yeux fixés sur le Mékong
et le Palais Royal.
Dîner
en ville au restaurant Park Houary Mixay.
Nuit à l’Hôtel SOVANAPHOUM
J
11
KUANSY
12/11/2001
Pensée
du jour :
« Quand
celui qui rigole le dernier a fini de rire, plus personne ne
rigole . »
Ne
pas se laisser impressionner par l’ascension des 328
marches du MONT PHOUSI, le « gros tas de riz » pour
assister au lever du soleil. Le petit temple presque
troglodyte, qui se trouve là-haut étonne : un rocher
surplombe la statue de Bouddha et semble le protéger. En
redescendant écouter dans le silence les psalmodies et les
prières des bonzes. Se laisser bercer en passager
clandestin du bouddhisme.
Mais
il faut reprendre le bus pour les chutes de KUANGSY. Nous
traversons des campagnes où la récolte du riz bat son
plein. Betty sous prétexte de cueillir quelques épis s’éclipse
dans les rizières avec KAH MOUN. Par égard pour notre
camarade Gérard nous tirons un voile pudique sur cet
incident.
Au
bord du chemin les minorités KMU et HMONG s’activent dans
les champs. Nous profitons du temps qui nous est alloué
pour flâner dans les villages. De toute façon comme dit
Betty : « le bus nous suit à pied ».
Le
28 décembre 1912, Monsieur SARRAUT, gouverneur général de
l’Indochine, en visite chez les HMONG rapporte : «
...les femmes elles-mêmes étaient venues montrer leur
jolis visages éveillés sous de larges turbans ... »
Pour les remercier de cet empressement le Gouverneur envoya
chercher un vieux phonographe dans ses bagages et régala
lui-même ses hôtes avec le « Veuve joyeuse ».
( L’Illustration 1913 )
Faut-il
s’étonner que ce peuple soit resté éternellement
rebelle et hostile à tout pouvoir centralisé ? Ils ont
été chassés des collines où ils pratiquaient l’essartage
et avaient donc des villages éphémères. Leurs maisons
sont posées sur le sol avec des planches verticales. Dans
leur pénombre le mobilier : un fourneau en argile où
s’encastre une marmite, une auge où les femmes mettent
les ordures ménagères pour les cochons, une urne avec l’eau
potable, le pilon de bois, le petit autel des génies
dressé sur le sol de terre battue et des alcôves
avec des lits surélevés.
Chemin
faisant, bus nous suivant, nous arrivons aux fameuses
cascades de KUANG SY qui sont au Laos ce que celles du
Nideck sont à l’Alsace. Il s’agit de belles chutes en
cascades sur des formations calcaires dans lesquelles elles
ont creusé de jolis bassins naturels de couleur turquoise.
D’aucuns y ont vu croître des crocus d’eau de montagne
» !!
Un
sentier abrupt permet d’entrer dans la forêt et
rejoindre le sommet de la chute. Les arbres ont l’air
d’avoir poussé en hâte droit, pour se disputer le ciel
malgré les lianes qui les enchaînent. La forêt est un
champ de bataille sur un le charnier. La branche qui pend ne
porte pas seulement des épines mais aussi des fourmis
rouges. En regardant de plus près une brindille ou une
feuille morte on découvre deux insectes aux aguets car l’un
a la forme d’une brindille, l’autre la rouille de la
feuille séchée.
Nous
pic niquons sur place puis reprenons notre promenade
bucolique. Après les Hmongs nous nous arrêtons chez les NU
dont nous n’avons pas vu le costume, non qu’ils ne
fussent pas habillés, mais simplement parce que c’était
l’heure de la sieste. En cours de route nous apprenons
grâce à l’obligeance d’une paysanne l’art de faire
les nouilles. Nous faisons encore un arrêt pour
« acheter le souvenir » à BAN PHANOM, village de
tisserand bien connu.
Le
retour vers la capitale royale est un peu précipité car
nous avons rendez-vous avec un coucher de soleil sur le Mont
PHOUSI. C’est l’heure où le Mékong s’enflamme, où
la lumière dorée éclabousse les temples enluminés de
verroteries et de pierres semi-précieuses. Le regard ne
sait plus où se poser, il voudrait embrasser tous les
monastères à la fois mais leur nombre est trop grand et l’instant
sublime qui précède la disparition du soleil est trop
éphémère. Après l’exaltation vient un sentiment de
paix . Alors le voyageur incrédule a envie de croire en
Dieu.
Sur
le chemin du retour, dans la pénombre des manguiers des
femmes en sarong bordés d’or, des hommes tenant dans
leurs bras des enfants aux yeux lourds sortent des maisons
silencieuses et d’un pas tranquille prennent le chemin des
pagodes .
Nous
aussi nous allons faire nos dévotions à l’hôtel.
Un
groupe de villageois nous invite à la cérémonie du BACY,
le rappel des âmes. En fait il s’agit de conserver ses 36
génies tutélaires qui ont une fâcheuse tendance à se
disperser. Cette cérémonie se compose d’une prière
récitée par le sage du village, d’offrandes que nous
font les villageois, puis les femmes nous attachent des
brins de coton à chaque poignet. Suivent dégustation
de fruits, de gâteau et libation à l’alcool de riz.
Nathalie se fait remettre une magnifique tiare d’apsara en
fleurs. Et tout cela se termine bien sûr en musique et
danses.
Au
Laos on danse pour le plaisir, on danse pour la pluie, on
danse quand on est heureux.
Nuit à l’Hôtel SOUVANNAPHOUM
J
12
LUANG
PRADANG
- XIENG KHOUANG
13/11/2001
Pensée
du jour :
« C’est
ce qui divise les hommes qui multiplie les
différents. »
Notre
avion étant retardé cela nous laisse une matinée de plus
à Luang Prabang. Il y a encore tant de choses à voir. A
commencer par le palais royal et le Musée . Ce monument est
le seul héritage monarchique de la ville. Mais ... surprise
le fameux Bouddha d’or, exposé dans la première salle
que l’on visite, brille de mille feux sous un lustre de
cristal. Style français et laotien se mêlent sans cesse
dans cette bâtisse. Ce palais est une illustration de l’histoire
du Laos. Dans certaines pièces, comme la chambre de la
reine, on se croirait dans un appartement français des
années trente. Dans la salle du trône c’est le Laos qui
s’épanouit : des murs rouges sur lesquels des
éclats de miroirs teintés de toutes les couleurs forment
une sorte de mosaïque naïve. On voit des scènes de
bataille avec des personnages décapités dont on retrouve
les têtes à leurs pieds. Une vraie B.D. pour enfants. Un
seul regret, que ce palais ne soit pas plus vivant... mais
la famille royale a été déportée, en 1975 à l’arrivée
des communistes, dans une grotte du nord du pays, où l’on
a perdu leur trace !
A
côté se trouve le VAT MAI, le nouveau monastère, qui est
la résidence du patriarche suprême que le nouveau régime
appelle le Président des moines .
Nous
faisons encore un dernier tour au marché. Rien de neuf sur
les étals mais on achète quand même, du moins certaines
(toujours les mêmes). Partout des goguettes populaires où
les cantinières servent la soupe aux nouilles de riz, le
bouillon gras mêlé de cheveux d’anges, les raviolis, les
gâteaux , les boulettes de poulet grillé, les petites
bananes grillées et les sandwichs au pain français.
Mais
c’est là en s’enfonçant dans le dédale des ruelles en
terre battue que l’on rencontre les Laotiens . On y
découvre leur vie au quotidien. Un homme sculpte sur sa
terrasse à petits coups saccadés les montants d’une
porte de bois.
A
côté une femme mâchant du Béthel, le fixe d’un regard
perdu. On entend le pilon tomber en rythme sur la papaye
râpée qui sert à confectionner la fameuse salade de
papaye verte laotienne.
Les
enfants transforment des feuilles en bateaux et les font
naviguer sur des flaques. D’autres jouent au KATAN, un
sport qui peut être très acrobatique puisqu’il s’agit
de renvoyer une balle en osier, sans se servir de ses mains
ni de ses mains : chevilles, tronc, genoux et tête
uniquement. Sur les toits, des forêts d’antennes
paraboliques. Les cris aigus des actrices des séries
locales se font entendre et se mêlent aux bruits des
moteurs des touks touks.
Dans
cette ancienne capitale royale ils ont une élégance toute
particulière. Le passager est assis sur un siège comme sur
un trône. Il est face à tous et à son côté se trouve
son chauffeur à califourchon sur sa moto.
En
regardant les attributs des femmes ( je vois déjà le
sourire gras de certains ) on entrevoit la diversité des
tissages du pays. Les fils de coton et de soie se frôlent
sans jamais se mélanger, les formes se dessinent sans
jamais se ressembler. Les métiers à tisser travaillent
encore et toujours au Laos. Les brodeuses s’activent au
foyer et au bord des chemins. Derrière chaque losange,
chaque couleur se cache aussi une histoire, un peuple, une
ethnie, une langue, une architecture, un système agraire,
une pratique religieuse, l’essence même de la
différence.
Luang
Prabang fait partie de ces lieux qui ne se visitent pas mais
qui vous visitent. Le visiteur ne décide pas de son rythme
c’est elle qui lui impose. Nous y prenons un dernier
déjeuner avant de nous rendre à l’aéroport où nous
attend un magnifique Illiouchine 100c.
Cet
appareil a été cédé d’occasion aux chinois qui l’ont
oublié au Vietnam et de là il a passé au Laos avec un lot
de ferraille. A l’intérieur il se dégage une curieuse
fumée et il y pleut par endroit. Heureusement le
revêtement interne de cet appareil est en formica massif
donc facile à éponger. Yves en profite pour serrer très
fort les mains d’Isabelle tout en serrant une partie de sa
propre anatomie.
Pour
nous rassurer le pilote survole un paysage lunaire criblé d’impacts
de bombes et finalement se pose sur un aéroport du bout du
monde rappelant les grandes heures de l’aéropostale.
Il
fait froid ! Le franc sourire et les
yeux pétillants de BOUNKONG, notre guide local, arrivent à
peine à réchauffer l’atmosphère. Nous sommes accueillis
à la chandelle car l’électricité n’est allouée que
de 18h à 23h.
Nous
allons dîner en ville dans un restaurant sans carreaux car
le verre est trop cher dans cette contrée. La bise souffle
de plus en plus fort et comme s’il n’y avait pas
assez de vent Gérard M. contrepet !
Nuit à l’Hôtel MALY
J
13
XIEN KHOUANG
14/11/2001
Pensée
du jour :
«
Si rien n’est mois sûr que l’incertain, rien n’est
plus certain que ce qui est sûr . »
Nous
sommes réveillés par le bruit de la pluie sur les toits de
tôle. Cela nous rappelle que nous sommes dans la ville la
plus bombardée de l’histoire. C’est aussi une ville
sans charmes. Comme à Verdun les vestiges de la guerre sont
omniprésents : cratères, fûts de bombe reconvertis en
objets en utilitaires ou de décoration comme dans la
salle à manger de notre hôtel.
Nous
prenons un bus antédiluvien sous des trombes d’eau pour
voir la fameuse PLAINE DES JARRES à propos de
laquelle les hypothèses les plus farfelues circulaient
jusqu’à ce jour . Il s’agit d’immenses urnes ( ?)
pesant de 600kg à une tonne pouvant aller jusqu’à 2,5m
de hauteur pour les plus grandes avec un diamètre de un
mètre, réparties sur plusieurs sites.
Leur
origine, leur destination ( alcool de riz, grains, urne
funéraire, grenier...) et l’identité de leurs premiers
propriétaires restent inconnues.
Mystères
et spéculations.
On
trouve aussi sur les sites des couvercles qui n’en sont
pas et qui seraient des pierres tombales. Il va de soi que
dans le groupe plusieurs nouvelles théories ont vu le jour
aux côtés desquelles la révolution copernicienne est une
vaste plaisanterie.
Comme
il pleut durant toutes les visites nous formons une
procession très colorée réunissant plusieurs ethnies: les
parapluies bleus, jaunes ou noirs et une autre
beaucoup plus exotique les coca-cola rouges.
Entre
chaque site, Bounkong, nous distrait en nous parlant de lui,
des différentes ethnies et de la philosophie lao. Ce brave
garçon a fait l’école normale mais a renoncé à l’enseignement
pour faire « un peu de tout comme le canard : marcher
un peu, voler un peu, nager un peu... » . Espérons
pour lui qu’il ne vienne pas de Cholon (ceci pour les
anciens d’Indochine).
Exemples
de questions « philosophiques » laos :
a)
Qu’est ce qui est plus chaud que le feu?
b)
Plus transparent que le verre ?
c)
Mange les hommes et n’a pas de dents ?
Réponses : a) la passion
b) la pensée
c) le souvenir
d) le temps
Toutes
ces digressions nous ayant creusées nous arrêtons au
restaurant SANGHA (absent du Michelin 2001) avant de visiter
le troisième site du jour. Les théories continuent de
fuser mais aucune n’emporte la palme.
Bounkong
nous explique les Hmong . Cette ethnie se subdivise en trois
sous-groupes :
-
les bleus dont les femmes ont des jupes tricolores
-
les blancs en raison des jupes blanches de leurs épouses
-
les noirs tout de noir vêtus
D’après
Roger qui se dissipe au fond du bus, en France il n’y
aurait qu’un groupe : les Hmong blancs ( Mont blanc pour
ceux qui ne lisent Vermot dans le texte ) .
Les
Hmongs ont des spécialités culinaires qui ne passent
inaperçues . Un exemple: ils raffolent de boudin et de
cervelles de porc crues, consommées avec de l’ail, des
petits oignons et des piments. Nourrissant: les larves d’insectes
trouvées dans les souches des arbres et consommées sur le
champ. Franchement dur : la panse de buffle avec son contenu
qui donne une soupe verdâtre très appréciée.
Pour
avoir un aperçu plus réaliste nous allons au marché
populaire de PHONSAVAN.
Notre arrivée déclenche l’hilarité
générale des autochtones car un coup de vent sournois
retourne les parapluies de Patrick et de votre
serviteur.
Nous
voyageons dans le chaos de couleurs opulentes de la
nourriture extrême-orientale. Le hasard des arrangements
est parfois si heureux qu’il semble avoir été réglé
par un peintre subtil : piment rutilant vert incisif ou
violet carmin, ananas bronze doré, fleur de bananes
garance, nœuds de gingembre, haricots germés, écheveaux
de vermicelle...
Et
juste à côté le musée des horreurs : étals regorgeant
pêle-mêle de crapauds, chauve-souris, renards , blaireaux,
hirondelles et autres morceaux de chairs sanguinolentes. Des
marchandes installées à même le sol proposent des
poissons-chat séquestrés dans de petites bassines aux
couleurs vives. Leurs barbillons frémissent d’indignation
d’être ainsi traités.
Bon
appétit !!
C’est
transis et frigorifiés que nous dînons chez notre guide
dont l’épouse Hmong et avisée tient un restaurant .
Grâce à des rasades d’alcool de riz la température
remonte un peu. Le défilé des filles de la maison en
costumes traditionnels chauffe définitivement la salle.
Nuit à l’Hôtel MALY
J
14
XIENG KHUANG
- VENTIANE
15/11/2001
Pensée
du jour :
« Se
rendre compte qu’on est un imbécile est un signe
d’intelligence »
Nous
quittons le plateau de Xien Khuang gelés par un vent du
nord venant de Chine. Nous attendons l’avion comme une
délivrance. Nous abandonnons donc la Sibérie laotienne
pour retourner à Wattay le minuscule aéroport de Ventiane
en pleine rénovation. Il semble tout droit d’un album de
Tintin. Tout le reste aussi d’ailleurs. Les voitures d’époque
qu’il faut pousser pour les mettre en marche, les panneaux
décoratifs d’un pieux réalisme socialiste. Ici nous
attend Kah Moun . Nous revoilà donc à VIEN CHAN qui en
laotien signifie la « cité du santal ». Cette
capitale lilliputienne aux allures de sous-préfecture
débonnaire est une juxtaposition de villages de bambous
autour d’un centre où bâtiments coloniaux et tristes HLM
soviétiques abritent côte à côte l’administration du
pays, les représentations étrangères et l’amorce d’un
capitalisme. S’y ajoutent quelques belles pagodes plus
ciselées que des boites à bijoux, un grand stupa blanc
piqué de l’étoile communiste, dédié aux morts de la
révolution ; des boutiques, une poignée d’hôtels et
même quelques dancings.
Sur
les larges avenues poussiéreuses et sans trottoirs, camions
à plateaux, 4x4, mobylettes, cyclo-pousses, «
touk-touks » se croisent . Rien que de très ordinaire
diront les pisse-vinaigre revenus de tout sans être aller
nulle part. Rien sauf peut-être l’indicible, la douceur
de l’air et l’indolence ambiante. On est à mille lieux
de la vibrionnante agitation des autres métropoles de la
région.
Nous
nous arrêtons près du Palais Présidentiel où nous
laissons attirer par le charme discret et original de VAT
SISAKET, le seul temple qui ait échappé au saccage de la
ville par les vietnamiens. Le cloître qui abrite des
centaines et des centaines de bouddhas de différentes
tailles en bois, en céramique, en bronze, en terre, en
pierre ou en argent . Alignés dans leurs niches ce sont eux
qui nous contemplent avec leur éternelle sérénité. Une
découverte magique !
Il
nous faut traverser la rue à pieds pour visiter le VAT PHRA
KEO, le monastère palais du bouddha d’émeraude,
qui est avant tout un musée d’art religieux permettant de
se familiariser avec les différentes attitudes de Bouddha
(voir vos manuels ). Le tout est assez hétéroclite.
Autre
site visité : le THAT LUANG, un grand stupa doré qui
ressemble plus à une pâtisserie qu’à un édifice
religieux . Un endroit sans vie et sans âme. Décevant.
Kah
Moun en bon patriote ne peut s’empêcher de nous faire
admirer PAT UXAY, la porte de la victoire, l’arc de
triomphe local qui ressemble à une grosse enclume.
Nous
déjeunons dans une ancienne maison coloniale transformée
en restaurant : le KUALO.
L’après-midi
est consacré au Marché du matin ce qui est d’une logique
implacable. Il s’agit de grandes bâtisses aux toits verts
dans lesquelles on peut acheter de tout et même des objets
au-delà du réel .
Avant de dîner nous intronisons les nouveaux venus dans le
groupe. Cérémonie émouvante et arrosée.
Certains
terminent la soirée par une promenade le long des berges du
Mékong . Il y a des guinguettes qui vendent du lap et
de la laobeer, des tables et des chaises en plastique
posées de guingois, un couple d’amoureux immobile sur un
banc, le regard perdu sur la ligne d’horizon, c’est à
dire l’autre rive où scintillent les mille feux de la
tapageuse Thaïlande. Il nous semble entendre, troublant
cette nuit sereine une voix de stentor chanter Constantin au
fond d’un bouge. Mirage de l’extrême-orient.
Nuit au NOVOTEL
J
15
VENTIANE -
HANOÏ - DUBAÏ
16/11/2001
Pensée
du jour :
« Il
m’arrive de douter de tout
et
je ne suis pas toujours certain d’être sûr de douter
»
Ils
nous ont dit : matinée libre. Donc le groupe opère en
ordre dispersé dans les rues de Ventiane. Il y a encore des
achats à faire. Certains néanmoins restent à l’hôtel
pour se refaire une santé en faisant la grasse matinée ou
en allant au fitness ( chacun sa méthode; de toutes façons
cela ne nous regarde pas !).
Nous
prenons un dernier repas lao avant d’entreprendre le long
périple du retour. Le petit Mercier Gérard qui suivait son
étoile s’est perdu dans l’aéroport de Ventiane.
Heureusement sa Maman lui avait accroché un carton avec son
nom et son adresse ce qui nous permet de le récupérer et
de le réintégrer dans le groupe.
LA
KON*, paisible Laos les farrangs prennent le chemin du
retour.
Première
escale à Hanoï dans un aéroport aseptisé où nous sommes
seuls. De plus il n’y a pas de boutiques ouvertes. Dur !!
Vols
sans histoires.
*
au revoir en lao
J
16
DUBAÏ
-
PARIS
17/11/2001
Pensée
du jour :
« En
somme le tourisme, comme quête de sens,
avec
les sociabilités ludiques qu’il favorise,
les
images qu’il génère, est un dispositif d’appréhension
graduée,
codée
et non traumatisante de l’extérieur et de l’altérité. »
A
l’escale de Dubaï certaines trouvent encore les
ressources morales et financières pour les derniers achats
( rien n’est moins sûr ).
Après
le groupe tombe dans un état semi-végétatif : manger,
dormir.
A
l’arrivée à Paris les gens de « l’intérieur »
nous quittent et le reste du groupe se disloque à
Strasbourg.
«
Oui, cela existe, j’y suis allé, je l’ai vu,
Oui
, je l’ai vu , cela existe, cela n’est pas seulement
quelque rêve,
Oui,
j’y suis allé, je l’ai même déjà raconté,
Oui,
cela a existé, cela a été construit pierre par pierre,
cela a été enfoui dans la forêt,
Oui,
cela a été retrouvé, exploré, débroussaillé,
Oui,
je le vois et je ne cesserai de le voir,
Oui
je vois ces visages et au-delà d’autres visages et
au-dessus un autre visage en larmes.
Ne
pleure plus la Lumière éclaire de nouveau ton pays.
à Chhorvivoinn.
Visiter
le Cambodge c’est faire connaissance avec un pays
attachant et fascinant où tout est à reconstruire des
extraordinaires vestiges du passé au quotidien des Khmers
qui émergent d’un cauchemar. Nous aimerions pouvoir dire
qu’ils sont définitivement débarrassés des derniers
soubresauts de violence mais seul l’avenir nous le dira.
Ils ont en tout cas retrouvé le sourire et nous ont
accueillis avec beaucoup de gentillesse. Quant aux temples
et palais khmers, malgré les pillages et les saccages, ils
se classent toujours sans contexte parmi les plus belles
richesses artistiques du monde.
Les
nouveaux riches habitent les bourgades et manipulent la
véritable monnaie du pays : le dollar. Les petites gens se
contentent des miettes de la manne touristique et manient
des riels crasseux. Les campagnes restent plongées dans les
oubliettes du temps. A la saison des pluies les routes se
transforment en fondrières. Le temps s’y est arrêté.
Mais
en ville l’air conditionné rafraîchit les chambres et
les téléphones portables atteignent en quelques secondes
mais à prix d’or les confins de la terre. Ici la vie se
réorganise. Angkor maintenant se visite et sa visite n’est
plus une aventure. Mais la civilisation khmère reste
difficile d’accès car mal connue. Certaines cours
entourées de galeries peuvent faire penser à des cloîtres
occidentaux, certains frontons sculptés à quelques
délires baroques, certaines sculptures à des chefs-d’œuvre
antiques. Le mystère demeure car les hommes qui ont
défriché les forêts, maîtrisé les eaux et construit ces
merveilleuses villes de pierre ont disparus.
Restent
les Khmers. Avec un regard étrange et profond, un regard
qui ne sait plus et qui a trop vu, un regard qui vous
interpelle et vous interroge, un regard qui ne vous quitte
plus et qui espère. Il vous sourit comme il a vu les
statues de ses ancêtres le faire. Il porte son âme au bout
des yeux et vous l’offre.
Voilà
ce que j’y ai vu.
Voilà
le regard du peuple Khmer.
Le
voyage au Laos nous a entraîné au cœur d’une
extraordinaire mosaïque ethnique aux traditions bien
vivantes, forte de costumes, langues et coutumes variés et
nous a fait découvrir le charme d’antan de l’Indochine.
C’est le pays du tout sourire, le pays de la nonchalance
au quotidien, de la confiance, de la tolérance et de la
patience. Les laotiens ont l’art du farniente et un
proverbe résume bien la situation :
«
le Viet plante le riz,
le
Khmer le regarde pousser,
le
Lao l’écoute s’épanouir ».
Montagnes
à jungles et plaines à riz, tuiles multicolores et cités
raffinées, le parfum des colonies te la magie du Mékong.
D’un
voyage au Laos restent la quiétude et la douceur, la
sensation d’avoir touché du bout du doigt l’harmonie, d’avoir
le présent qui coure ailleurs, d’avoir effleuré une
nature où l’homme se confond avec la végétation, tant
il cherche à se lier à elle éternellement. Cette sage
indolence, cet attachement aux valeurs d Bouddha, leur
fameux « Bo pen naing », le philosophie du
rien n’est grave résisteront-elles encore longtemps à l’invasion
économique ?
Ce
voyage est terminé, d’autres se profilent.
Merci
à chacune et chacun d’entre vous pour votre
contribution à sa réussite.
Merci
encore et toujours à Nath et Gérard nos chevilles
ouvrières.
A
bientôt sur d’autres lignes.
En
attendant, plein de bonheurs à vous tous.
Maurice