1996  Birmanie
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BIRMANIE OU MYANMAR ?

En 1989 le Conseil d'état de la restauration de la loi et de l'ordre (tout un programme) change le nom de Birmanie en Myanmar. Les défenseurs de la démocratie vivant dans le pays et à l'étranger s'opposent catégoriquement à ce changement. Par respect pour leurs idées nous voyagerons donc en Birmanie.

" Voici la Birmanie, un pays qui sera différent de tous ceux que tu connais "

( R. KIPLING)

Moment magique: la timide Birmanie s'ouvre aujourd'hui aux visiteurs alors qu'elle était jusque là un pays fermé. La nature avant les hommes en avait décidé ainsi car cet état constitue une manière d'île enserrée dans un fer à cheval faussement ouvert sur la mer, car le Golfe du Bengale se laisse peu pénétrer. Jusqu'à ce jour on visitait la Birmanie à la dérobée le temps d'un visa trop court. Aujourd'hui elle ouvre ses portes sur des trésors longtemps inaccessibles aux voyageurs. Une occasion inespérée pour les curieux que nous sommes d'aller à la rencontre de ce pays à la forte personnalité, l'un des plus mystérieux et des plus attachants du globe.

 " Celui qui a voulu faire de ce pays une entité géographique est un amateur de cartes à l'imagination fertile "  

(un diplomate à Rangoon en 1880)

J I -  01/11/96 PARIS -FRANCFORT -BANGKOK

Le vol PR 749 s'affiche avec cinq heures de retard. Le temps de trouver un papier gras dans l'aéroport aseptisé de Francfort. Mais quelle joie de retrouver le reste de la troupe déjà installée dans l'avion.

Le temps de trouver des traducteurs allemands et français pour donner les consignes de sécurité nous décollons enfin pour Bangkok. Là en raison du retard et du manque de place sur le vol suivant nous devons abandonner Gwen, Nathalie, Yves et Gérard dans la Sodome thaïlandaise. Pauvres petits! ! !

J 2 -  02/11/96 BANGKOK - YANGOON

C'est donc avec quatre personnes en moins que nous arrivons à YANGOON (ex Rangoon), où nous attend notre guide LWEN. Entre temps nous avons encore perdu trois valises. Quelle hécatombe! ! !

Lorsqu'on atteint l'ancienne " perle de l'Asie " ou l'ex " petite City " depuis l'aéroport ultramoderne de Bangkok on se sent l'âme d'une " Alice au pays des merveilles " poursuivant quelque lapin blanc birman pour déboucher dans un lieu pétri de la plus stupéfiante fantaisie et de la plus singulière beauté.

Après l'aéroport on longe un grand lac de retenue, le lac INYA, parsemé d'îles boisées, sur une route où seules quelques maisons basses sur pilotis, quelques villas de style colonial sortent des cocotiers, des bananiers ou des bouquets délicats de bambous. Ces bungalows d'inspiration Tudor délabrés semblent attendre le retour des " sahibs ".

YANGOON ressemble en miniature à Madurai ou Bombay mais dans cette ville anglo-indienne il n'y a plus guère d'indiens et plus d'anglais. Les rues se coupent à angle droits et sont grises de poussière. L'urbanisme sert un colonialisme anglais aux antipodes du pimpant et de la légèreté. Des buissons voire des arbres poussent sur les toits et les rebords de fenêtre. Tout cela est atténué par des pancartes bariolées et du linge à sécher.

Gîte du jour : INTYA LAKE Hôtel

J3 -  3/11/96 YANGOON

Dès le réveil c'est la chaleur, la fine poussière où chatoie la lumière, les bruits et les parfums de la terre qui vous envahissent. En ville les rues sont remplies d'une foule bigarrée où chacun exécute avec lenteur et en souriant, une tâche dont lui seul semble connaître l'importance. Déjà les bonzes et les moinillons drapés de rouge ou de jaune et pieds nus, bol de laque serré sur leur poitrine quêtent leur nourriture. Des taxis riquiqui (petites Mazda bleues semblant sortir d'une B.D. ), des camionnettes que deux planches fixées à l'arrière transforment en transport en commun, des bus poussifs hors d'âge et bourrés et bien sûr le pauvre et exotique cyclo-pousse biplace quadrillent l'asphalte. Tout cela roule, pétarade, sonne et klaxonne.

Un premier arrêt au LAC ROYAL permet aux dames de s'émouvoir devant les pectoraux luisants de jeunes Birmans en pirogue pagayant avec entrain alors qu'au loin noyé dans la verdure jaillit le stupa d'or de SHWEDAGON la fabuleuse.

" Au milieu trône cette pyramide d'or en forme de cloche à long manche qui se voit de loin, sa pointe brille comme du feu, et sa base qui s'élargit pour former un cône immense, ressemble à une colline tout en or. De l' or partout, auprès et au loin, de l'or se détache sur l'or..."                                                  (Pierre LOTI)

 

C'est vers elle que nous allons maintenant malgré les soupirs enamourés de nos compagnes.

Haut dans le ciel, les corneilles omniprésentes exécutent des ballets inlassables et fatiguées elles posent leur corps noirs sur le sommet d'un stupa, d'un toit ou prosaïquement sur un tas d'ordures pour faire leur travail d'éboueurs.

Très vénérée Shwedagon est l'affirmation de la foi et de l'identité du peuple birman. C'est à la fois Lourdes et Disney land.

L'entrée est gardée par des monstres en pierre blanchâtre étonnants de massive barbarie. Leurs têtes se profilent sur le ciel gueule ouverte, crocs dégainés dans un rictus. Sans doute ont-ils pour mission d'avertir le visiteur qu'il n'y aura pas que de la grâce dans cet éden mais qu'il y planera aussi un peu d'effroi et de mystère parce que c'est la demeure des esprits. A leurs pieds un essaim de petits vendeurs proposent des bougies jaunes, des feuilles d'or, de l'encens et des fleurs pour accompagner la montée vers le stupa. On accède à la terrasse par des escaliers couverts bordés de mille échoppes où l'on achète des gongs, des parasols, des jouets, des statuettes, des sucreries, des fleurs, plein de fleurs pour les bouddhas qui habitent là-haut. L'odeur du lys, du jasmin, du gardénia se mêlent à l'encens des bâtonnets incandescents. On est enivré par l'excès et le mélange de ces parfums dans la chaleur molle qui règne ici.

Au bout des couloirs montant on aperçoit dans un lac de lumière la flamme dorée de la prodigieuse parure qui couronne le stupa.

Une fois arrivé sur la plate-forme le charme s'opère, à la fois mystérieux, délirant et kitsch dû à l'omniprésence du sourire et de la sérénité de Bouddha.

Ici on mange, on dort, on prie, on s'incline devant une rangée de bougies tremblotantes tandis qu'un serviteur de pagode crie les prières pour vous ou arrose les statues. Ici on se prosterne devant Bouddha et les esprits birmans qui ont envahi le bouddhisme local. Tout cela est salué par des tintements de clochettes et de coup de gongs, par le crissement des ombrelles et de mobiles étranges.

Et tout là-haut ce dôme incrusté de pierres précieuses qui brille... brille de toutes les richesses d'un Orient fantasmagorique.

On comprend mieux l'émotion de nos glorieux aînés :

" Les pagodes de Rangoon, sont au nombre des merveilles qu'en passant sur terre il faut avoir vues "  (Pierre LOTI)

" Elle apparaît... comme une lumière soudaine dans la nuit de l'âme"                                        ( Sommerset MAUGHAM )

" ...mystère doré "            (Rudyard KIPLING )

Près de la rivière Yangoon nous passons devant le mythique Hôtel STRAND monument des temps révolus en Extrême-Orient comme l'Oriental de Bangkok, le Continental de Saigon ou le Peninsula de Hong Kong. Les ombres de R.Kipling, de S.Maugham et de Mountbatten y planeraient encore!

Nous nous arrêtons quasiment dans le cœur de la cathédrale Saint PAUL ( construction massive en briques) avant de nous sustenter à " l'Eléphant Vert " restaurant bien connu dans la quartier.

Après un détour par l'hôtel où deux des trois valises manquantes avaient fait leur réapparition, nous partons pour le CHAUK HTAT GY! où ce trouve un gigantesque bouddha couché. Sous un toit de tôle étayé par des poutrelles d'acier il semble allongé dans un hall de gare en attente d'un prochain train pour le " nirvana ". Ses pieds sont décorés des 108 marques caractéristiques de son état.

Avant de rentrer à l'hôtel nous nous promenons dans le quartier chinois et son marché. Dans le crépuscule bleuté flottent des odeurs fortement épicées avec la promesse d'un excellent repas. Car ici Mc DO n'est pas encore arrivé! Ici on mange des larves bien dodues, des criquets frits et autres " delikatessen " !

La nuit tombe vite et les rues se vident rapidement, les silhouettes furtives des passants attardés sont absorbées par l'obscurité et le silence. Nous aussi.

Après les valises, nous retrouvons nos thaïlandais. L'aventure peut enfin commencer !

Gîte du jour: INTHA LAKE Hôtel

J 4 -  04/11/96 YANGOON - PAGAN                                                                                             

Réveil à 4h pour prendre l'avion direction PAGAN.        

Marco Polo dans son célèbre récit parle du " pays d'or ". Par delà de la célébrité mythique on peut se demander quelle fut la véritable étendue et l'importance de Pagan?

Une légende tenace parle de la " cité des quatre millions de pagodes ". Les historiens plus sérieux parlent de cinq mille. Un dernier recensement en rapporte 2217. Nous nous contenterons de moins: SHWEZIGON, ANADA, KYANSITHA avec ses caves...

Le repas de midi est pris au restaurant MYA YA DA NO où " ne parle pas français mais on mange bien " comme l'annonce un panneau devant l'établissement. A table nous apprenons que le guide répond maintenant au doux nom de " Petit Prince ". Son bassin étroit, sa jupe ajustée et sa mèche folle avaient perturbé Dominique PH et Marie-Jeanne. Un drame se noue!

L' après-midi nous continuons la découverte de cette soudaine explosion artistique, au milieu d'une plaine sèche, qui surgit au tournant du grand fleuve. On est pris du saisissement que seuls génèrent quelques grands sites architecturaux. Une floraison de temples, de stupas, de pagodes, de styles si divers qu'il est difficile de s'y retrouver même pour un guide birman!

A perte de vue temples et pagodes de briques rougeâtres entourés d'un terrain ocre se dressent par centaines au milieu d'une végétation désertique d'épineux. Dans les champs arides jonchés de millions de briques provenant des monuments détruits, les paysans indifférents conduisent leurs chars à buffles entre les broussailles et les débris séculaires.

Fresques, peintures murales sur fond ocre, brun, blanc, aux silhouettes avec des yeux de biches. Statues innombrables de bouddha dodu, squelettique, tourmenté, souriant, grave... Plaques sculptées aux monstres grimaçants et aux symboles difficiles. Sanctuaires abandonnés, ouverts à tous les vents et tous les pillages. Bouddhas éventrés, statues décapitées qui n'en sont que plus émouvantes. Les niches vides comme des orbites énuclées de leur regard, gardent cependant la beauté des paradis perdus. L'air transporte les poussières des monuments et les parfums de l'Asie et les deux vous collent à la peau.

Mais qui dit temples pense marchands. Ici comme ailleurs ils sont là avec leur pierres " précieuses " , leur artisanat local et leurs " vrais " antiquités. Tout cela donne lieu à du troc et des marchandages.

Nous commençons la série des visites de l'artisanat local par une fabrique de laque où les ouvriers ne travaillent que sous le regard des touristes. Premiers achats!!!

Du sommet de la pagode SHESANDAW nous admirons le coucher du soleil sur le site. Les temples les plus proches se découpent en lignes sombres sur le ciel; les plus lointains sont si peu visibles qu'ils semblent être des édifices irréels d'une cité de rêve. Au crépuscule le ciel décline sa palette incomparable de bleus, de mauves et d'oranges.

Dîner au restaurant RIVER VIEW au bord du fleuve IRRAWADY que les Birmans surnomment respectueusement " le fleuve éléphant " et qui fit tant rêver Kipling.

Des milliers de feux argentés du fleuve sous la lune et les étoiles plongent le spectateur dans l'abîme d'une méditation intense. Sur de lointains bancs de sables des pêcheurs irréels, lancent leurs filets dans l'eau empourprée ressemblant à de l' or en fusion.

Alors comment ne pas penser à ces vers du très connu MYO MYINT SWE :

" S'il te plaît monte ...

Marche sur la pointe des pieds

Ce beau pont d'arc en ciel 

Si délicat, il pourrait se briser

De frayeur qu'on le touche

S'il te plaît repose toi

Pour te rendre détendue

Des libellules, des papillons

Vont apparaître pour te divertir

Tels des êtres humains

Avec des chansons

De la musique, des danses... "

 

Gîte du jour: GOLDEN EXPRESS

J 5 - 05/11/96 PAGAN                                                                                                                                       

Nous continuons la visite de PAGAN, la " Florence de l' Asie " qui rayonna dans le monde durant plus de trois siècles par les visites des temples de ABEYADANA, NANPAYA et MYINKANDA ainsi que la pagode de LOKANANDA. Nous faisons encore un tour au marché de NYAUNG 00 haut en couleurs et riche en odeurs avant de visiter ce paisible village.

Repas à l'hôtel puis c'est la route à travers la campagne pour nous rendre au MONT POPA où se niche au sommet d'un piton de lave volcanique la maison des NATS (esprits locaux). La montée de cet olympe est rude et raide, véritable épreuve d'effort pour myocarde défaillant. Là-haut le panorama est fantastique et propice aux méditations de toutes sortes, entre autres sur la solidarité de certains confrères refusant de soigner l'un des leurs à l'article de la mort. Il s'en est même trouvé un qui proposait une gélule d'Ercefuryl pour soigner un angor ( alors que le générique de ce produit coûte 47% moins cher!!!)

Avant le dîner nous avons droit à un spectacle de danses. Gracieux!

Gîte du jour: GOLDEN EXPRESS

J 6 - 06/11/96 PAGAN - MANDALAY                                                                                                             

Nous quittons Pagan dont un géographe français en 1883 écrivait dans la géographie universelle: 

" ...est situé sur un promontoire de la rive gauche de l'Irrawady. La multitude des édifices sacrés à statues, à colonnades, à terrasses, à tourelles, à coupoles en boutons, en cloche, en oeuf ou en citrouille, fatigue la vue et l' imagination. "

Avant le départ pour l' aéroport " Petit Prince " apprend à quelques femmes contemplatives et émues l'art de fixer un longyi. Cette démonstration déclenche chez Dominique PH. le syndrome du kangourou c'est à dire une succession de petits sauts verticaux sur place, le cou légèrement penché vers l'avant et les yeux exorbités. Spectacle à la fois gracieux et émouvant! ! !

Nous atterrissons ( Dominique aussi) une heure plus tard à MANDALAY qui est la dernière capitale du royaume birman et la deuxième ville du pays. Ville basse et torride, étalée dans un vaste coude du long fleuve Irrawady, si poussiéreuse que l' on pourrait la croire noyée dans un épais brouillard.

MANDALAY est aussi un poème de Kipling, un palais colossal ( le palais " loyal " ) dont chacun des côtés mesure 2km, mais carré vide dont il ne reste que les remparts.

MANDALAY, l'industrieuse bétonne autour de ses temples et s'échine à copier la modernité occidentale. Les vielles calèches tirées par des poneys ont laissé la place aux pétaradantes petites motos japonaises qui emplissent les rues rectilignes en dégageant une forte odeur d'essence... Subsistent les files de moines, de novices comme une armée soucieuse de quête et d'aumône, les étals de jasmins et d'hibiscus, le marché traditionnel plein de bruits, d'activité et de couleurs.

La visite matinale nous mène tour à tour au monastère SHWE NAN DAW en tek, à la pagode MAHAMUNI avec son magnifique Bouddha, à la pagode KAUKDAWGY et surtout à KUTHODAW qui représente le plus grand livre du monde. On y trouve tous les canons bouddhiques gravés sur 729 dalles de marbre chacune dans un stupa individuel.

Repas au Honey Garden restaurant qui se distingue par sa magnifique vaisselle en plastique massif rehaussée par les oeuvres majeures de Walt Disney.

L'après-midi est consacré à l'artisanat local: tailleurs de marbre, sculpteurs sur bois, fondeurs de bronze dont la source d'inspiration ne varie guère: Bouddha encore et toujours !

MANDALAY c'est aussi les " mignonnettes " ( marionnettes) et nous ne manquons pas d'en acheter grâce à Monsieur " BY " qui voulant une casquette a fait arrêter le " bious " devant un magasin d'artisanat local. On peut y admirer le travail des " kalagas " (tapisseries brodées) faites par des ouvrières semblant bien éloignée de la retraite! !

Bien sûr nous terminons cette journée par un spectacle de marionnettes.

Gîte du jour: SWAN HOTEL                   

J7 - 07/11/96 MANDALAY- AMAPURA -SAGAING -MINGUN                                                               

AMAPURA ("cité immortelle ") est située au bord du lac TAUNGTHAMAM où les pagodes d'une éclatante blancheur se reflètent dans ses eaux vertes. Lac où de nombreux hommes immobiles dans l'eau jusqu'à la taille pêchent alors que des centaines de canards y glissent lentement.

Le monastère de BARKAYA nous ouvre sa porte discrètement (car c'est interdit comme le change) et nous découvrons la bibliothèque d'ouvrages palis et une impressionnante collection de bouddhas ( en marbre, en bronze, en bois doré ...)

Puis instant bucolique: 

la promenade sur le vieux pont branlant en tek qui traverse le lac, le pont U BEIN. Un endroit paisible où tout le monde vaque à une occupation sans hâte et où les gens se croisent et se croisent et se recroisent, ou s'arrêtent simplement pour se laisser griser par l'ambiance. Il suffit de s'asseoir sur le rebord avec une canne en bambou et pêcher pour que le temps s'arrête.

Mais comme il faut toujours avancer nous continuons notre route vers le monastère de MAHAGANDAYON où vit un millier de bonzes et pour aller assister à leur repas. Très vite on est gagné par la sérénité et le calme de cet endroit où plusieurs centaines de personnes arrivent à faire la queue et manger en silence. De quoi faire rêver un gérant de restaurant universitaire !

A la demande quasi générale d'une seule personne nous nous arrêtons dans une soierie et dans une autre pagode celle de KAHMUDO.

Puis c'est la montée sur SAGAING dans des taxis locaux plus proches de la bétaillère que de la limousine. Au sommet de la colline se situe la pagode de U PONY A avec ses trente grottes et autant de bouddhas dans un décor de carrelages de salle de bain. De là haut on voit des centaines de pagodes et de monastères enfouis parmi la verdure et les fleurs. Tous ces îlots de calme et de spiritualité encore préservés, sont autant d'images hors du temps, ignorant l'intervention de l'homme qui l'a fragmenté en heures, minutes et secondes.

Repas au HAPPY Restaurant

Avant de prendre le bateau pour MINGUN nous admirons le travail des buffles tirant d'énormes billes de tek hors de l'Irrawady pour les charger sur des camions. On ne peut qu'être impressionné par la force tranquille de ces bêtes en symbiose avec leurs maîtres dans ce décor d'eau et de boue.

La remontée de l'Irrawady nous permet de goûter à la vie campagnarde des berges du fleuve et de la vie sur l'eau. Les mots rendent mal compte de la beauté de ces eaux reflétant des cieux d'un charme toujours différent et qui apportent la paix aux esprits les plus inquiets.

Déjà au loin apparaît le paya de MINGUN avec sa fissure, cicatrice d'un séisme passé. Ce qui devait être le plus grand zédi du monde est devenu le plus grand et le plus cher tas de briques du monde .

 

 

A côté du paya se trouve le pavillon avec la cloche de Mingun ( 4 mètre et 90 tonnes ), la plus grande de la planète en état de marche ( pour faire la nique à celle de Moscou qui est plus grosse mais fêlée !) .

Un peu plus loin nous nous arrêtons encore à la pagode HSIBYUME avant de reprendre le bateau au soleil couchant.

 

Durant ce court passage dans ce village certains ont frisé la correctionnelle ( en raison d'affaires en cours nous ne donnerons pas de détails)

Gîte du jour: SWAN HOTEL

J8 - 08/11/96 MANDALAY -HEHO -PINDAYA                                                                                            

Drame dès l'aurore: Marie-Jeanne a profité de la nuit pour supplanter Dominique dans le sœur ( et ailleurs) du " Petit Prince " ) qui du coup se fait rebaptiser " Pol POT " (décidément les femmes sont bien versatiles!!). Ne voulant pas nous immiscer dans ce psychodrame nous l'appellerons sobrement P.P. C'est avec une pensée émue pour Jean-Pierre que nous décollons de Mandalay.

De HEHO nous faisons le trajet en " bious " pour nous rendre à PINDAYA à travers la campagne où les paysans s'activent à la récolte des choux et du riz. Cette campagne mérite que l'on s'y attarde tant elle est bucolique avec ses camaïeux de vert, jaune et bruns. La lumière filtrée à travers le feuillage des grandes essences ombreuses, l'acacia à l'écorce brune, le tamarinier aux vastes branches étendues par un siècle de lente croissance. Les maisons s'alignent de part et d'autre d'un ruisseau où nagent des canards, où fouillent des porcs gris. La maison est bâtie sur pilotis et les parois sont faites de tiges de bambous refendues tressées pour constituer d'élégants motifs alternés bruns et jaunes. Un buffle à la peau craquelée surmonté d'un gamin va d'un pas lent et les chars à bœufs soulèvent des nuages de poussière rouge.

Des femmes accroupies se rassemblent en groupe, telle des conspiratrices. Mais en fait ce sont de gentilles et rieuses petites personnes, des fleurs dans les cheveux, le rire aux lèvres avec juste ce qu'il faut de race jaune pour retrousser le coin des yeux et donner une câline expression de chatte. Elles ont le visage frotté de tanaka qui leur laisse un maquillage blanc sur les joues et la nuit brune de leurs yeux est traversée d' étoiles filantes.

Pour en parler qui mieux que les poètes sauraient le faire :

" Sa joue

est plus belle que l'aube

ses yeux

plus profond que le fond du fleuve

quand elle relâche ses cheveux

sur les épaules

c'est comme la nuit venant sur les collines. "

                                               ( Chanson birmane )

Quant à leur caractère il faut croire ce que nous dit ce proverbe birman: " le matin les femmes ne sont pas gaies, l'après-midi, elles se querellent, mais le soir elles sont douces et aimables ". N'est-ce pas là le plus important ???

Après ces digressions revenons sur la route qui nous mène vers les grottes de PINDAYA à propos desquelles circule une légende fort compliquée où il est question de filles enlevées, d'araignée tuée et d'un ogre... Dans ces excavations ne se trouvent pas moins de 8049 statues de Bouddha ( de quoi contenter les plus difficiles )

Repas dans un restaurant local et promenade dans le village pour voir une fabrique de papier. Dîner à l'hôtel avec un spectacle " typique local ".

Gîte du jour: PINDAYA INLE INN

J 9 - 09/11/96 PINDAYA NYAUNGSHWE                                                                                                   

Dès le lever du soleil nous reprenons la route de HEHO en direction de TAUNGGYI. La récolte de choux bat toujours le plein. Nous pénétrons dans l'état SHAN où nous faisons un premier arrêt au marché de SHWENY AUNG, haut en couleurs et riche en odeurs.

Repas à TAUNGGY avant de nous intéresser à la fabrication du CHEROOT le fameux cigare birman. 

Tous les voyageurs célèbres de Kipling à Loti en passant par Kessel et Norman Lewis, ont célébré " l'âcre et noir cheroot birman ". Ce cigare de forme et de couleur variable est ici un trompe la faim et un signe extérieur de pauvreté et petit plaisir quotidien. 

Si Dieu est un fumeur de havane, Bouddha c'est sûr fume des cheroots!!

Les filles qui fabriquent ces cigares nous éblouissent par leur dextérité. Elles arrivent à faire environ 1000 cigares par jour pour un gain de 85 kyatts (soit un peu moins de 3 FF par jour! )

Après un nouveau caprice de Monsieur " BY " qui demande un arrêt dans le grand hôtel de la place ( on a les pipis qu'on mérite) nous reprenons la route vers NYANGSHWE. Avant d'y arriver nous faisons une halte au monastère et au temple de SHWEYAN PYAY pour assister à une leçon de lecture pour moinillons. Après, une promenade dans le village de PAHO célèbre pour sa culture d'aulx nous arrivons enfin aux portes du LAC INLE.

Gîte du jour: Hôtel HU PIN

J 10 - 10/11/96 LAC INLE

Le LAC INLE fait partie des endroits privilégiés où la nature et l'homme ont travaillé ensemble pour donner un paysage inédit. Etendu entre deux murailles montagneuses, l'immense plan d'eau doit sa beauté autant au labeur des INTHAS ( " les fils du lac ") qu'à son environnement naturel. Ce lac est une véritable aigue-marine dans un écrin d'émeraude qui respire la poésie et la spiritualité. Sa couleur passe d'une heure à l'autre au gré de la lumière changeante, du bleu profond au vert émeraude. Ici la beauté est partout, dans le banal geste de ces cultivateurs-pêcheurs qui font avancer leur barque à l'aide d'une jambe enroulée d'une pagaie dans un déhanchement des plus gracieux. En effet la pêche à la nasse nécessite trois mains et un pied: une pour maintenir la nasse au fond, une pour manœuvrer le trident, une pour tenir la rame et le pied pour rester en équilibre à l' arrière de la pirogue. Faute de main supplémentaire ils ont pris le pied pour ramer.

Les Inthas ont relevé le pari de transformer une calamité en chance, ils ont contrôlé le chiendent local, les jacinthes d' eau (Eichhornia crassipes) pour en faire des terrains maraîchers où poussent à fleur d' eau oignons, tomates, fruits, piments et aubergines.

Cette plante aux larges feuilles piquetées de fleurs bleues forment des tapis flottants très solides grâce aux entrelacs de ses racines. Avec une scie de deux mètres le paysan découpe une île flottante d'environ 2m sur lO-l5m, brûle les feuilles et les fleurs puis arque bouté sur une perche il amène son nouveau lopin en friche rejoindre son jardin. Il étale une couche de tourbe dessus et voilà une nouvelle parcelle fertile pour subvenir aux besoins de sa famille et se faire un pécule au marché.

Le marché flottant consiste aujourd'hui en une série de barques surchargées de babioles pour touristes. On est loin du spectacle haut en couleurs annoncé.

A la pagode PHAUNG DA 00 nous avons la chance d'assister à la prononciation des vœux de quelques moinillons. Un tour dans le centre artisanal du lac nous apprend que les hommes en dehors de leur talent de maraîcher et de pêcheur travaillent les métaux (armes blanches et orfèvreries), le bois et le bambou. Les " filles du lac " coiffées de leurs chapeaux coniques avec des rubans flottants au vent fabriquent des sacs shan que tous les birmans portent sur leur épaule ainsi que des cotonnades et des pièces de soie.

Le paysage est peuplé de bambouseraies, de palmeraies et d'aréquiers, d'imposants monastères de bois, de monuments ornés de stuc et de sculptures polychromes et de villages sur pilotis.

Les maisons ont une architecture qui obéit à des règles strictes aussi fonctionnelles que sociales ou religieuses. Elles reposent pour l' essentiel sur les points cardinaux et la valeur du haut et du bas, du masculin et du féminin, du sacré et du profane.

Au monastère NGA PHE CHUANG il y a un personnage original. C'est un bonze et ses chats qui sautent à travers un cerceau qu'il tend à un mètre du sol à la grande joie des touristes qui déposent un billet dans une soucoupe prévue à cet effet. Bouddha ferme pudiquement les yeux sui ce numéro de cirque bien éloigné de la philosophie même bouddhique.

Plus qu'une merveille le LAC INLE est un miracle.

Je ne parlerai pas de la femme-girafe débarquée ici pour quelques photographes. Sordide!

Gîte du jour: HU PIN Hôtel

J10 - 10/11/96 TAUNGGY -HEHO -YANGOON

Nous rebroussons chemin et laissons le LAC INLE derrière nous. Déjà dans le fond du " bious " les fomenteurs de putsch et complots de tous poils reprennent leurs activité sournoises. 

Comment ne pas penser à la " DAME " de Birmanie, DAW AUNG SAN SOUKYI (prix nobel de la paix 1991)

" La peur de perdre le pouvoir corrompt ceux qui l'exercent, la peur du fléau du pouvoir corrompt ceux qui le subissent"

Une dernière incursion dans le pays Shan au marché de HEHO où nous pouvons admirer à loisir les femmes dans leurs parures noires et leur turbans multicolores, le cheroot à la bouche. Drôle de pays où les femmes fument le cigare et les hommes portent la jupe. Drôle de pays où " les gongs sont des cloches qui klaxonnent ". Drôle de pays où l'écriture apparaît comme une décoration d'une exquise et exotique fantaisie toute en rondeur. Drôle de pays où la cuisine est essentiellement à base de " tronches " de viande et de légumes.

Après-midi libre à YANGOON

J11 -  12/11/96 YANGOON -FRANCFORT -PARIS RAS

Au terme du voyage il reste l'impression d'un pays où le temps se serait figé préservant les paysages et les hommes. Partout les lieux sont vivants et invitent sans cesse à s'arrêter, regarder et méditer. Sur les routes chaotiques le spectacle est permanent. Des buffles marchant de guingois traînent de lourds chars, des enfants gardent des chèvres ou des vaches sur le bas-côté , des groupes de pèlerins grimpent une colline vers un temple, des camions et bus antédiluviens transportent des récoltes et des gens agrippés à leur bastingage. Plus loin des bonzes présentent leur bol à aumône, des radeaux de tek descendent l'Irrawady, sur le lac des pêcheurs rament étrangement avec leur pied Et partout ces sourires qui illuminent les visages et brillent comme une petite lueur d'espoir adressée aux touristes. " Un tel voyage appartient vraiment au domaine du merveilleux " disait Joseph KESSEL dans la Vallée des Rubis. Pour clore je retiens la formule à la fois dépouillée et émouvante de notre guide qui défini mieux que de longs discours l'art de voyager :

                                                                " on part d'ici et on va ailleurs "

Alors à bientôt. Ailleurs.

Maurice.

" Adieu Ava

endormie avec tes pagodes

blanches .

Sur tes terrasses des cloches

semblent faire écho aux poésies

de jadis. "

                        ( poème birman du XVIlIème siècle )