

AFRIQUE DU
SUD
1995
« L'émotion est nègre, comme la raison est hellène
»
«
La seule façon de voir l'Afrique du Sud, c'est de fermer
les yeux »
Breyten BREYTENBACH
«
Lorsque deux soleils rouges sang se lèveront dans le ciel
d'Afrique du Sud une terrible tornade précipitera les
blancs dans la mer et les
noirs seront libres »
Prophétie Xhesa (
1857 )
Ni le blanc ni le
noir n'avaient raison. Le 27/4/94 la révolution s'est faite
dans les urnes et le nouveau président MANDELA a pu déclarer :
« De notre expérience d'un désastre humain extraordinaire qui a duré bien trop
longtemps doit naître une société dont toute l'humanité sera fière.
Nous prenons l'engagement de construire une société dans laquelle tous les
Sud‑Africains, noirs comme blancs, pourront marcher la tête haute. »
Comme tout le monde
nous voulions nous émerveiller de ce pays nouveau et croire
à la légende de la nation "arc en ciel" comme on
baptise désormais l'ex-patrie de l'apartheid.
AFRIQUE DU SUD, un
nom qui évoque à la fois un continent et la chaleur du
midi. Le soleil et l'or, le professeur Barnard, le diamant
et le rugby. Mais ce n'est pas que cela.
C'est aussi un pays
fascinant qui contient tous les mondes dans un seul espace. C'est
l'Afrique avec ses déserts, ses brousses et ses savanes.
C'est l'Inde avec ses douceurs et ses odeurs. C'est la Provence avec ses vignes bordées de cyprès. C'est le Tyrol avec les hauteurs escarpées et enrubannées de
montagnes. C'est l'Amérique avec ses canyons. Mais c'est
surtout un pays que la nature a façonné et modulé d'une
manière unique comme si elle avait voulu résumer ici
toutes ses capacités d'invention.
« La liberté n'a pas la couleur noire de ma peau,
ma négrité n'est pas un manteau qu'on exhibe pour dire que
moi seul je suis libre parce que des chaînes m'ont lié. La
liberté n'a pas de couleur. Le sang qui la verra naître
sera l'offrande de tous ceux qui ont lutté et péri pour
elle, ceux qui croyaient en la fraternité humaine et non pas
à la couleur de la peau le temps n'est plus aux rêves. »
James MATTHEWS
J1
22/10/95
PARIS /LONDRES/CAPE TOWN
Finalement nous étions
29 à nous envoler vers cette Afrique du Sud rêvée pour
entonner sur place le grand air de la réconciliation
nationale :
« N'kosi Sikéli Fi Afrika ». (Dieu sauve l'Afrique.)
Vol Paris - Londres
et Londres - Cape Town sans histoire. Notons quand même le
raffinement de la tenue des hôtesses de la B.A, chapeaux à larges bords sans doute destinés à recueillir
la pluie et d'élégantes chaussures servant sans doute de
flotteurs en cas d'amerrissage forcé. Très Armée du
Salut.
Autre détail
marquant : dans notre groupe se trouvait un « mec avec une
nana pas mariée (dixit la préposée à l'enregistrement). Cherchez l'intrus!
J2
23/10/95 CAPE
TOWN / CAP DE BONNE ESPERANCE / CAPE TOWN
A l'aéroport de Cape Town nous attendaient notre
guide Violette ‑ qui n'avait rien d'impériale ‑
et une stagiaire au prénom très féminin d'Alex. Nous
attendait aussi l'éternel problème de valise. Il y avait
une qui avait choisi un autre groupe pour visiter la ville.
Dès la sortie de l'aéroport on
reste perplexe. Sur l'impeccable asphalte de l'autoroute les
voitures roulent pare chocs contre pare chocs. On se met à
penser que le pôle méridional de l'Afrique serait un
jumeau d'une métropole européenne égaré au soleil. Mais
la signalisation remet les pendules à l'heure locale. La
bizarrerie toponymique l'indique, on a bel et bien perdu le
nord. Les noms de Kapstad, Bellville, Gugenloten, Moddemann
illustrent une imbrication anglo-franco-néerlando-bantoue.
Et la réalité humaine accentue cette complexité : c'est
ici que s'est élaborée la subtile alchimie sud-africaine
qui a donné naissance à une société fortement métissée.
Nous faisons un
rapide passage à travers la ville pour nous rendre au «
front de mer « ou nous attendent un repas de fruits de mer
et les premiers vins du pays. La Victoria et Alfred
Waterfront est un ensemble de docks joliment réhabilités
abritant des centaines de boutiques de mode et de
restaurants. Le bout du monde se présente comme une cité
élégamment bourgeoise avec ses avenues aérées bordées
d'immeubles cossus et de rues piétonnes, et ses quartiers résidentiels
étalés face à la baie. Mais la vraie richesse de la ville
est son environnement naturel, un extravagant ensemble de côtes
rocheuses, de plateaux et de pies plantés en pleine cité.
Mais avant d'être la brillante devanture de l'Afrique du
Sud et la « cité mère » elle a longtemps été un port
tapageur surnommé la « taverne des mers ». Elle dégage
une extraordinaire force : sentinelle fichée aux confins du
continent noir sur les routes éternelles qui conduisent à
l'Orient.
Une fois restaurés
nous prenons la route du littoral direction HOUT BAY où
nous attend un bateau pour aller voir l'île aux phoques qui
comme son nom l'indique est un morceau de terre en pleine
mer et peuplée de pinnipèdes!
Les points de vue
changent à chaque virage de la route nationale qui longe le
littoral. Des rivières coulent à travers des gorges
encaissées pour ce jeter directement dans l'océan ou des
lagunes. Des forêts denses peuplées d'arbres séculaires
et résonnants de cris d'oiseaux invisibles, dévalent les
flancs des hauteurs et recouvrent les vallées. Dans des
criques rocheuses se cachent de petits villages. Ailleurs la
mer s'écrase sur des immensités de sable.
C'est aussi un véritable
royaume floral. Les bruyères ne déploient pas moins de
cent variétés. Les protéas - fleur étrange, symbole de
l'Afrique du Sud - comptent un nombre incalculable de spécimens.
Les griffes de sorcières s'étalent en tapis. Nul n'est
besoin d'être spécialiste pour s'émerveiller devant cette
exubérance de couleurs et de formes aux si jolis noms: la
« tête emplumée », la « mariée rougissante », la «
fleur des Dieux », la « pelote d'épingles », ...
Quant à la faune
nous ne verrons qu'un malheureux bontebock égaré sur un
plateau mais d'après Violette il y aurait beaucoup de
serpents pas trop « poissonneux », donc peu dangereux.
Et enfin nous voici
arrivé à la pointe d'un mythe, pointe extrême
d'un continent,
jonction de deux océans que tout oppose, l'un, l'océan
Atlantique, froid, sévère, poissonneux, l'autre, l'Océan
Indien, chaud, coloré et découpé par de multiples baies.
En fait la rencontre se fait quelques 150 km plus à l'est
au cap Aguilhas (l'aiguille). Le paysage est grandiose et
les rafales vous fouettent le visage. Tel Atlas vous portez
sur vos frêles épaules le poids de tout un continent.
Grisant. Ici toute une chaîne de montagnes semble entraîner
avec elle toute l'Afrique pour se jeter dans une mer
rendue folle par des remous puissants et la confrontation
des courants. Les marins l'avait baptisé le cap des tempêtes
ou False Bay (la trompeuse ). Mais dès que les premiers débarquèrent
les impressions furent vites révisées. Le cap devint de «
bonne espérance », « route des jardins », « pays des
hommes chargés de miel », « arc d'or », ...

Dîner
à l'hôtel
Gîte
du jour: HOLIDAY INN EASTERN COAST
J3
24/10/95 CAPE
TOWN / ROUTE DES VINS / CAPE TOWN
Aujourd'hui
journée arrosée d'après notre Programme, d'après la météo
aussi. C'est sous un déluge que nous prenons la route du
vin qui va du Cap à Stellenbosch à travers une Afrique
inattendue, cultivée comme un jardin et polissée. La végétation
le relief et les couleurs ( quand on arrive à les
distinguer !!) évoquent moins le continent noir que la
Provence, les Côtes du Lubéron ou les Alpilles ( avec un
temps breton). Seule l'architecture, le célèbre « Cape
Dutch » avec ses murs à pignons et ses aristocratiques façades
blanches aux lignes géométriques rappellent que les
Hollandais ont modelé cette terre généreuse. C'est JAN
VAN REEBECK qui a planté les premiers ceps et qui a écrit
dans son journal à la date du 2/2/1659: "Loué soit le
Seigneur car aujourd'hui pour la première fois on fait du
vin avec du raisin du Cap". Mais ce sont les Huguenots
français qui donnèrent l'essor au vignoble. Le premier
pressoir et le premier tonnelier étaient alsaciens (kukuruku
TIT)
Le vignoble du Cap a
ceci de particulier que ce sont les endroits exposés au
nord qui reçoivent le plus de soleil et que les vendanges
se font de mars à mai. Du riesling au sémillon pour les
blancs, du cabernet sauvignon au syrah pour les rouges, près
de cent variétés de cépages se sont accommodés avec
bonheur du soleil austral.
Nous faisons une première halte à
Stellenbosch pour visiter le musée du village ensemble de
quatre maisons d'époques successives montrant l'évolution
du mode de vie et pour faire un tour rapide et mouillé
de cette petite cité riche en maisons « historiques ».
Puis enfin l'arrêt tant attendu dans une cave : le Bergkelder avec la dégustation promise. Ce n'est pas ici
que nous avons découvert la dive bouteille pouvant faire
oublier un Laffitte‑Rothschild 82 ou une Romanée 45, mais le talent est bien
présent et nous serons surpris sous peu de l'amélioration de la qualité de ces
vins. A suivre...
A midi nous sommes
gratifiés d'un pique-nique froid - oh combien -
que nous prenons dans la chapelle du Morgenhof (propriété
viticole). Ici nous ne dégustons que du blanc, le rouge étant
trop précieux pour être galvaudé !
Après ces agapes,
étape obligatoire au FRANSCHLOEK "le coin des Français".
Il s'agit d'un petit village un peu perdu au pied du
Drakenstein où se dressent deux édifices à côté d'un
cimetière. L'un en hauteur, le mémorial élevé à la mémoire
des huguenots français (une arche à trois pieds). Non
loin de là dans le style « Cape Dutch » a été construit
le musée de ces mêmes huguenots et qui réunit des objets
et des documents leurs ayant appartenu. Insolite de voir en
cet endroit au sud du continent africain, des portraits de
grandes figures protestantes : le Prince de Condé, Gaspard
de Coligny et le Prince Henri de Navarre ( alias Henri IV).
Que reste-t-il en héritage
de ces réfugiés huguenots ? Leurs descendants ne parlent
plus leur langue. Les Cellier, Leroux, Malherbe, Lagrange ou
autres Du Toit comme le héros d'André BRINK dans «Une
saison blanche et sèche» fleurissent dans les annuaires.
Certains patronymes ont subit des modifications : De Clerc
est devenu De Klerk, mais tous les descendants actuels sont
au moins sûrs d'une chose : une quinzaine de générations
a été ensevelie ici, phénomène exceptionnel pour les
blancs d'Afrique. D'autres encore ont donné leur nom à
la géographie locale: Wemmer river, Wemmer mountain et
Wemmer pan, si, si !!! Et les fermes des vallées
portent toujours des noms français : la Garonne, la
Provence, la Motte...
Repas à l'hôtel.
Gîte
du jour : HOLIDAY INN EASTERN COAST
J4
25/10/95
CAPE TOWN / DURBAN
Il pleut toujours
!!! Malgré les intempéries nous tentons une ascension (
par téléphérique) de la Montagne de la Table. Plus nous
montons plus le froid devient sibérien et nous craignons
les premières gelures. Mais la récompense est au sommet.
Quelle vue impressionnante sur la baie et la ville. Violette
nous apprend que les pirates - hommes sournois - « scrutinnaient » la mer depuis le Pic du Diable. Ces rochers
recèlent de drôles d'habitants ressemblant à des
croisements entre des marmottes et des éléphants : les
damans des rochers.
Lors de la descente
nous avons à déplorer deux manquants dont nous tairons les
noms pour ne pas affoler les familles ( en fait il
s'agissait d'un breton et d'un citoyen d'Uberach). Ils
auraient été contraints de se réfugier dans un bar en
raison d'une tempête de neige! Les pauvres !!!
Grâce à l'habilité
de notre chauffeur nous réussissons à faire le tour de la
ville qui est quadrilatère, en passant par le quartier
malais, devant le Château Hollandais pour finir au
Waterfront dans les boutiques.
Autre attraction du
jour : le West Coast Ostrich Ranch où rien ne nous est épargné
concernant la vie intime et publique des autruches. Repas à
base d'omelette et steak de ce charmant volatile. Puis c'est
le retour à Cape Town où nous abandonnons Violette, Alex
et Peter pour prendre un vol en direction de DURBAN.
Ce vol banal se
transforme en film catastrophe en raison de quelques
turbulences qui secouent notre aéroplane. Les conséquences
immédiates sont l'arrivée inopinée d'une hôtesse sur les
genoux de JeanPierre R. ( les anglo-saxonnes ne sont pas réputées
pour le bon goût ! ) et le vol plané d'un plateau chargé
dans l'allée centrale. Pendant que tout ce gentil monde
arrimé aux sièges et abîmé dans les prières attend la
fin de cette sarabande, le (cher) Président (adoré) se
transforme en yoyo dans un endroit peu reluisant pour
terminer une belle carrière. C'est une troupe de couleur
vert‑olivâtre qui débarque à Durban la tête
enfouie dans des sacs en papier. Glorieux !!! Le remake du «
Naufrage du Titanic »
dans « La tour infernale ».
Gîte du jour:
HOLIDAY INN MARINE PARADE
J5
26/10/95
DURBAN / HLUHLUWE
Au
réveil la troupe a repris ses couleurs initiales c'est à
dire du hâle alsacien au rouge vineux. De plus nous découvrons
enfin qu'il y a du soleil en Afrique. Notre nouveau guide
est un zoulou de Soweto nommé Danie quant au chauffeur,
c'est Monsieur Johannes Mercibokou. Durban - pour ce
que nous pouvons en voir - ressemble à un coin de
Californie au bord de l'Océan Indien avec de grandes
plages. On y trouve une juxtaposition de bâtiments
victoriens, de temples bouddhistes, d'immeubles
ultramodernes et de mosquées indiennes. L'ambiance
cosmopolite de cette cité est marquée par l'influence
indienne que l'on ressent surtout dans le marché municipal
dit « indien » qui surprend par ses couleurs et ses épices.
Nous y faisons un tour au pas de course car dit toujours Danie : « il faut gagner le temps ».
Après ce rapide
intermède nous prenons la route vers le Natal et
Zoulouland. Nous faisons un arrêt à Shakaland dans un
kraal ( village) pour un spectacle de danse exécuté (
c'est le cas de le dire ) par de farouches guerriers et de
graciles jeunes filles. Zoulou signifie « peuple du ciel »
en français. Le kraal a une forme ronde comme les huttes et
est entouré par un enclos de bâtons ou d'épineux. Cette
forme a une signification symbolique profonde. La hutte
correspond à la matrice et les zoulous disent des enfants
d'une même femme qu'ils sont de la même hutte. Les hommes
sont polygames et pratiquent le « Lievfrou » qui consiste
à vivre quelque temps avec une femme et à lui faire des
enfants. Dès qu'on s'en lasse on en prend une autre.
Heureusement chaque femme possède sa hutte, son grenier et
ses champs. Il arrive toutefois que le « lievfrou » se
retourne contre le cavaleur. Rentrant trop tard, il trouve
porte close. Alors sa femme répond qu'elle dort déjà. En
clair elle a un autre homme dans son lit.
Il n'y pas de bonheur parfait !!!
Après un repas pris
sur place nous continuons vers le nord en traversant de
grandes forêts d'eucalyptus destinés à la fabrication de
pâte à papier et non au sirop pectoral. Nous arrivons
assez tôt à Hluhluwe pour faire un premier safari.
Apparemment les dieux sont avec nous puisque nous croisons
des zèbres, des lycaons, des éléphants, des buffles, des
cobs de Fossa, des phacochères, des gnous, des impalas, le
grand koudou, le fameux rhinocéros blanc et même une hyène.
Gîte
du jour: HLUHLUWE INN
J6
27/10/95 HLUHLUWE
/ MALELANE
Le matin nous reprenons la route et le bus (si, si!)
pour le SWAZILAND, petit royaume enclavé entre l'Afrique
du Sud et le Mozambique, surnommé la petite Suisse de
l'Afrique. En effet le paysage montagneux et la quiétude de
ce petit pays ne sont pas sans évoquer la pétillante Hélvétie.
D'ailleurs d'après Danie les swazilandais sont «sympas à
cause de leur christianité». Nous faisons quelques haltes
pour y laisser notre écot (fabrique de bougies, verrerie et
marché de Mbabane). Tous ces arrêts nous mettent en retard
ce qui oblige Johannes à faire étalage de toute sa vista.
C'est donc en ayant chaud aux fesses et dans un nuage de fumée
que nous arrivons à la frontière avant la fermeture de
celle-ci (après 18 heures on ne passe plus!)
Gîte
du jour: MALE SUN LODGE
J7
28/10/95 MALE
LANE / KRUGER / NELSPRUIT
Malelane Sun Lodge,
bel hôtel en passant, nous sert de tremplin pour entrer
dans le Parc Kruger. A nous l'Afrique épique ! L'Afrique
avec ses baobabs deux fois millénaires, ses soleils rouges
( quand ils se lèvent), ses cactus en fleur, ses gros
papillons safranés, ses savanes formées par le galop de
sabots de tout crin, ses fleuves grassement peuplés ( il y
a des crocos et des hippos ), ses jungles qui s'ouvrent sous
les ventres des rampants comme les pythons.
Une Afrique avec des
dents et des griffes, avec des lions, des guépards et des
panthères. Une Afrique avec des plumages d'estampes et des
fanfreluches de l'autruche au héron en passant par les
aigles royaux, plus de 600 espèces d'oiseaux se croisent ici.
Partout des stridences et chuchotis
Mais comme les
animaux « sont mal barrés il faut aller les chercher »
dixit Danie. Nous en trouvons plein et de toutes sortes.
Entre autres l'éléphant sous le parasol d'un bouquet
d'acacias tâtant du bout de sa trompe un arbuste avec les
gestes lents de celui qui n'a pas grand chose à craindre.
Lourd de 4 à 6 tonnes il est l'hôte le plus imposant de la
savane. Il en est aussi le jardinier en détruisant les
buissons et en déterrant les arbres et maintient l'équilibre
de la végétation herbeuse et forestière. Les passagers à
l'avant du bus ont eu la chance de voir aussi des lions, des
koudous, des zèbres, des girafes, le rhinocéros blanc, des
singes, des phacochères et autres animaux à poils et à
plumes. A l'arrière où se tenaient le bar et l'élite
l'approche de l'Afrique était plus pointue. En effet
cette partie du groupe s'occupait de la flore ( sujet
beaucoup plus complexe que la flore, c'est bien connu !).
Ils virent donc de grands acacias, de petits acacias et même
de moyens acacias.
Nous prenons le
repas de midi dans le parc à Lower Sabie avant de reprendre
la piste. Celle-ci est longue et agitée. Cette fois les
turbulences sont à l'intérieur du mode de transport car
notre hôtel se trouve dans un endroit complètement excentré
et éloigné de notre circuit. Un cadeau de l'agence !
Cela nous permettra de voir trois fois la même route sans
payer de supplément. Finalement c'est aussi cela le
voyage !
Gîte du jour: CROCODILE
INN NELSPRUIT
J8
29/10/95
NELSPRUIT / HOEDSAZUIT / NELSTRUIT
Nous reprenons donc
la même route. Le froid et la pluie ne réussissaient pas
à réchauffer l'atmosphère. Enfin ... C'est aussi cela le
voyage, si si...
Après un tour au marché aux fruits de
Haziview nous arrivons au Kampala safari club de Hoedsazuit
où se trouve un centre d'élevage de guépards et de léopards
qui nous permet d'approcher ces magnifiques fauves dont le
regard clair et pénétrant donne le frisson tant il y a de
la douceur dans cette menace de mort qui fascine. Dans leur
yeux on trouve les reflets du miel et de la mort.


Ainsi conditionnés
nous partons faire une marche en brousse encadrés par deux
solides gaillards armés jusqu'aux dents et par un pisteur.
ce dernier devait être myope comme une taupe, très enrhumé
et souffrant
Après ces émotions
fortes nous avons droit à un repas frugal et froid de
surcroît pour nous requinquer. Beaucoup profitèrent de cet
instant de répit pour s'équiper en vêtements polaires.

L'après-midi est consacré à une
nouvelle sortie en brousse en 4X4. Notre équipage prend de
plus en plus la tournure vestimentaire d'un groupe d'immigrés
clandestins turc. Cela a au moins le mérite de faire sortir
les animaux ravis d'un tel spectacle et cela nous permet
d'augmenter notre capital image.
Le dîner est pris
en « brousse » autour d'un feu de camp qui réveille de
vieux souvenirs à quelques scouts nostalgiques dont les
chants mélodieux ont vidé définitivement cette réserve.
MAIS QUE FAIT DONC Brigitte Bardot ???
A peine si j'ose le dire: retour par la même
(longue) route vers notre hôtel.
Gîte du jour : CROCODILE COUNTRY INN
J9
30/10/95 NELSPRUIT / PILGRIM’S REST / BLYDE CANYON
/ JO'BURG
Il pleut ce matin
sur l'Afrique (si, ça arrive). Nous avons une longue
route devant nous (cela arrive aussi) et nous partons avec
un retard considérable (ce qui arrive également) .Tout
cela à cause de chercheurs d'or indélicats qui ont trouvé
un filon dans une de nos chambres et de la police locale
(rapide et efficace) qui ont oublié de nous rendre notre
guide. Tout se vole dans ce pays. Cela ne nous empêche pas
de quitter Nelspruit pour la dernière fois.
Premier arrêt
rapide pour admirer les chutes de MAC MAC pour arriver enfin
à Pilgrim's Rest pour un repas aussi tardif que mérité.
Ce site est la reconstruction du premier village minier à
l'époque de la ruée vers l'or (19ème siècle). On y
trouve des maisons en bois, de vieux hôtels et saloons, une
imprimerie, un musée de l'or et - oh merveille- un «
bottle store » pour refaire le stock de l'arrière du bus.
En cours de route
nous admirons les Bourke's luck potholes ( marmites de géant), exemple magnifique du travail d'érosion d'une rivière et
des précipitations (car il pleut dans ce pays) qui ont
creusé la roche en grosses cavités cylindriques.
Et enfin le Blyde River Canyon. Des vues (quand il n'y a pas de brouillard) à
vous couper le souffle. Les paysages sont si beaux qu'une
des chaînes de montagne a tout simplement été baptisée
« God's window » - la fenêtre de Dieu -. Les eaux
paisibles, la couleur du ciel, l'horizon qui semble basculer
sur lui même derrière une lumière brumeuse : tout incite
le promeneur à s'arrêter pour contempler un paysage
propice au silence et à la méditation.
Très vite nous
sommes ramenés aux tristes réalités- impératifs
horaires, brouillard, kilométrage .... Sur la route de
Jo'Burg nous ramassons un groupe de touristes français en
panne de bus et que nous déposons un peu plus loin.
Heureusement notre conducteur pilote aussi rapidement par
temps de brouillard que par temps clair ce qui nous permet
de rejoindre l'hôtel avant le réveil !!!
Gîte du jour:
HOLIDAY INN SANDTON
J10
1/11/95
JO'BURG
/ GOLD REEF / SUN CITY
Jo'Burg ressemble
à un Dallas miniature avec ses gratte-ciel qui découpent
l'horizon, ses autoroutes qui charrient des torrents de
voitures. Tant qu'on se promène parmi les buildings le
regard au ciel on se croit en occident. Dès qu'on baisse
les yeux dans l'ombre des tours on plonge en Afrique. Une
marchande de fruits qui porte un nourrisson en suspension
sur son dos, dépose méticuleusement une assiette de pommes
sur l'asphalte recyclé en étal. Les désordres et les
rondeurs de la population adoucissent les angles droits des
tours et des avenues tracées au cordeau.
Jo'Burg affiche
aussi sa singularité avec ses énormes taupinières jaunes
pâles qui jalonnent la plaine et qui sont les résidus des
fabuleuses mines d'or qui ont fait la fortune de la vieille
Afrique du Sud. Ici on y détruit et on y construit sans «
e'ool i » - la cité de l'or-.
Nous nous rendons à
Gold Reef City, espèce de luna-park élevé à la
gloire de ce minéral précieux. Nous y descendons dans une
mine et en remontant nous comprenons mieux le montant élevé
des ornements de nos compagnes.
Les plus studieux
font ensuite un tour à la Morningsite Mediclinic du fameux
Professeur ( mais ne le sont-ils pas tous?) Kinsley où la réception
fût très conviviale et chaleureuse et où apparemment on
n'a pas peur des infections nosocomiales ( c'est du français
) puisque nous nous promenons en tenue de brousse dans les
services de réanimation. Pendant ce temps les autres font
ce qu'ils veulent car cela ne nous regarde pas.
En route nous
faisons une étape gastronomique au « Carnivore » où nous
attendait un barbecue géant avec toutes sortes de viandes
embrochées sur d'énormes épées. Nous y dégustons du
poulet, du crocodile, du koudou, du boeuf, du porc, du
mouton, de l'impala, de l'élan du Cap, du zèbre. De quoi
faire frémir un végétarien !
Mais que fait
Brigitte Bardot ??
Le ventre plein nous
arrivons à SUN CITY dans l'enfer du jeu qui allait happer
certains d'entre nous qui y laisseront leurs derniers ronds.
Gîte du jour: SUN
CITY HOTEL
J11
2/11/95 SUN
CITY /
JO'BURG /
LONDRES / PARIS
SUN CITY a été édifié dans
l'ancien bantoustan de Bophuthatswana par le milliardaire
Sol Kerzner car les jeux de hasard et les casinos étaient
interdits en Afrique du Sud. C'était le paradis des jeux.
Elle a perdu maintenant sa réputation sulfureuse de « Sin
City » ( cité du péché) et est devenu la capitale des
loisirs. Las Vegas ou Disneyland disposé au fond d'un
immense cirque montagneux, c'est la reconstitution d'un
monde délirant mêlant la Rome antique, Angkor, l'Inde et la
Vallée du Nil et l'exubérance botanique africaine, cascades,
lagunes artificielles, piscines géantes, l'eau abonde
partout dans ce désert. Des tronçons de colonnades dressés
à flanc de collines , des falaises avec des sculptures
d'animaux sauvages. Un décor à la Spielberg qui se révèle
une formidable machine à se divertir. on y trouve des
sanctuaires en ruine élevés en hommage à l'on ne sait
quel dieu. Et comble de raffinement au Palace on micte
" on the rocks " !! du moins chez les hommes...

Depuis plusieurs jour nous sommes
intrigués par le comportement de certaines d'entre nous.
Donc certaines jeunes filles dont nous dirons simplement et
par discrétion qu'elles sont pharmaciennes, remplissaient
leur baignoire de bouteilles de vin vides. Le verre aurait-il
remplacé le lait d'ânesse?? Sun City porte bien son nom
puisque nous profitons enfin et pour peu de temps du soleil
africain.
Après un dernier
repas pris au Country Club du Palace nous prenons la route
de Pretoria cette ville est constituée d'un ensemble de
quartiers aérés et fleuris par des jacarandas, avec au
centre une place où trône le Président Kruger.
Puis retour à
Jo'Burg et son aéroport international pour le vol vers
Londres.
J12
3/11/95 JO'BURG
/ LONDRES / PARIS
Vol sans histoire ni turbulences...
Certains voyages se résument en un ou deux
adjectifs. Il faut en inventer pour définir l'Afrique du
Sud car le vocabulaire s'affole devant la variété de ses
paysages, la beauté insolente de ses sites et la diversité
de ses espaces Diversité des hommes aussi : exceptionnel
melting-pot de races, de langues et de peuples; jusqu'à présent
cette richesse potentielle incomparable a surtout apporté
du sang et des larmes. Ici plus qu'ailleurs l'histoire des
hommes se lit dans le relief de la terre.
Diversité
des musiques : chansons hollandaises, rythmes zoulous,
cantiques protestants et blues des townships. Creuset
musical fécondé au gré des avatars de l'histoire locale.
Finalement
parler de l'Afrique du Sud est impossible. Cette
fascination pour les lieux se double d'un sentiment que le
pays reste encore à bâtir. L'esprit pionnier n'a pas
disparu de ces terres neuves et déjà chargées d'histoire.
On comprend l'attachement des habitants à leur pays qui
explique parfois la violence qui y règne : les uns veulent
en profiter pleinement et les autres ont peur d'en être
chassés
« L'on peut lire, comme j'en ai lu
enfant, des brochures sur la belle Afrique du Sud, ce pays
de soleil et de beauté, à l'abri des orages du monde, et
éprouvé de l'orgueil et de l'amour pour cette terre et
pourtant ne rien connaître d'elle. C'est plus tard
seulement que l'on apprend qu'il y a autre chose ici que du
soleil, de l'or et des oranges. C'est plus tard seulement
que l'on découvre les hommes et les terreurs de ce pays. Et
c'est alors que notre amour pour lui devient profond et
passionné. »
Alan PATTON
( Pleure ô pays bien aimé)
«
J'ai vu deux océans se cogner
devant
la griffe de Bonne espérance,
des
aloès, des arums, des protées,
et
quelques regards ébréchés.
J'ai
vu le désert parsemé de
fleurs
éphémères et violettes,
des
springboks, des guépards en liberté
et
quelques regards désabusés.
J'ai
vu les gratte-ciel dorés,
les
caves
regorgeant de grands crus,
des
piscines, des bateaux par millier
et
quelques regards envenimés.
Oui
j'ai vu Soweto le soir enfumée,
des
bus bondés brinquebalants,
des
kilomètres de barbelé
et
quelques regards illuminés.
»
Une fois encore nous avons fait un voyage ensemble et
chacun dans son coin va le revivre avec ses impressions
positives ou négatives. Une fois encore nous nous sommes
aperçus que si la vie en groupe est enrichissante elle
n'est pas toujours facile. Alors en guise d'épilogue je
vous livre ces deux citations:
•
Vous avez fait un long voyage pour arriver au voyageur »
(proverbe persan)
•
Le visage de la terre c'est dans votre cœur que vous le
voyez. » (GIONO)
Et pour en terminer merci à Gérard sans qui rien ne se
ferait et à vous tous sans qui rien ne pourrait se faire.
MAURICE
Nath et Gérard ;-)