AFTER
INDIA
ETAPP en INDE DU SUD
( Novembre 1986
)
Chers amis, le
magnifique périple réalisé en Inde du sud par trente cinq
heureux « étappiens et étappiennes", nous a
conduit, en quelques chiffres à passer environ 24 heures en
vol, à emprunter 12 vols différents, que nous avons
toujours réussi à attraper, même si ce fut parfois
d'extrême justesse, surtout lorsque les bus, toujours eux,
nous faisaient quelques infidélités ... nous en
reparlerons...
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Or donc, après une escale à Delhi
nous atteignons Bombay, point de départ de notre circuit
vers le sud, convoité de si longue date. Nous devrons pour
mériter ses charmes nous astreindre à des « grasses
matinées » généreuses, parfois jusqu'à six heures
du matin oui madame! mais rassurez vous, pas d’excès au
quotidien, en fait, il nous a fallu souvent renoncer au lit
un peu plus tôt que cela encore ! Après un premier vol intérieur
jusqu'à Bangalore, un premier bus nous attendait, « super
vidéo coach » tout de chromes éclatant, et le cérémonial
d'embarquement des valises sur l'impérial de prendre une
bonne heure, pendant que je comptais et recomptais les
valises (mon obsession), et que j'apprenais que nous aurions
un guide francophone dans « quelques jours »...
but we do speak english, so wie so ! De là nous allons
commencer à apprécier les charmes de la route indienne, où
se mêlent dans la plus parfaite harmonie mais pour notre
plus grande frayeur, piétons insouciants, cyclistes
folkloriques, chars à bœufs, chèvres et inévitables et omniprésentes vaches sacrées... Il faut préciser, pour ne
pas paraître hyperémotif, que les routes ne sont pas forcément
bonnes et qu'elles sont toujours étroites, au point que le
croisement d'un autre véhicule ressemble à s'y méprendre
à une joute de chevalier, où pour ne pas périr, chacun
prend soin d'esquiver l'autre à la dernière seconde...
Vous voyez sûrement le spectacle des deux bus, chacun ayant
une moitié de ses roues sur le bas côté, se frôlant sans
ralentir, après un copieux concert de klaxon devant théoriquement
intimider, mais en théorie seulement, le tout en circulant
à gauche. Enfin, il
vaut mieux s'y faire, car ce n’est que le début du périple
et nous parcourons ainsi plus de 1500 km pendant ces quinze
jours.
Le charme du pays
est ailleurs, et pour moi, essentiellement dans celui de ses
habitants, qui comptent certainement parmi les champions
toutes catégories du sourire et de la courtoisie. Il est sûr,
en effet, que tous les indiens ne sont pas riches, mais
cette tarte à la crème de la misère en Inde est très agaçante
dans la bouche de gens qui ne connaissent pas ce pays. Il
faut dire, qu'à part les inévitables bidonvilles des très
grandes métropoles, où quelques milliers de désespérés,
ruinés par deux ou trois années sans pluie pour leur
culture, viennent se frotter au mirage d'une réussite
citadine, l'essentiel de la population (85%), vit de et dans
l'agriculture et ceci de manière pas plus misérable qu'en
Afrique du nord, par exemple. L'Inde étant par ailleurs la
dixième puissance industrielle de la planète, ayant une
industrie aéronautique, disposant de la bombe, envoyant
elle même ses propres satellites, etc... Ceci pour faire un
sort aux clichés usuels .....
Revenons à l'objet
de notre voyage, tourné vers les sites religieux et les
temples d'Halebid de Belur, etc., qui sont de pures
merveilles de sculpture, de la dentelle ayant pour
inspiration les divinités de l'hindouisme que sont, Brama,
Shiva, Vishnou, leurs épouses respectives, leurs différentes
incarnations, leurs véhicules, etc.
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Après Mysore et
Hassan et une nuit complète de pluies torrentielles, nous
devions parcourir un peu plus de cent kilomètres sur des
routes souvent inondées et même, oh, horreur ! privées de
quelques ponts emportés par les eaux. C'est ainsi que
durant plus d'une heure notre bus est resté dans une
curieuse posture, moitié sur la boue de la 'route', moitié
dans la rizière voisine, ses valeureux passagers ayant
consciencieusement fuit le 'navire' en perdition ! Mais tout
devait s'arranger après avoir été aidés par des
autochtones tout sourire, et même deux paysans équipés de
houes se prêtant à des travaux de déblaiement de la boue
sur la chaussée pour se confondre en remerciements lors de
notre départ, après avoir été gratifiés d'un billet de
cinq roupies chacun (2,50 f).
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Tout va bien et nous
attrapons notre avion pour Cochin sans encombre supplémentaire,
le chauffeur de la voiture d'accompagnement montrant de
remarquables compétences en « Système D », il
répare en effet avec un flegme consommé la panne électrique
en coinçant le fil dans la bobine avec ... une allumette et
après avoir claqué son capot moteur avec assurance, se
remet au volant sans sourcilier, sûr de son coup de démarreur,
comme à chaque fois que cela se produit depuis au moins
vingt ans sur son véhicule noir qu'il connaît par cœur.
Fabuleux comme sa conduite d'ailleurs qui a eu raison des
plus téméraires, puisqu'au deuxième jour déjà plus
personne, sauf votre serviteur ne manifestait d'enthousiasme
pour lui tenir compagnie ( le bus théoriquement trop petit
et déjà inquiétant dans son comportement routier,
devenait presque trop grand ! mais si ! mais si! ....
Arrivé
à Cochin, nous apprenions que le bus qui nous était réservé,
ne viendrait pas. Sur fond d'une grève des téléphones
dans sa huitième semaine, il me fallait organiser au pied
levé la location d'un autre bus, ce qui prit une partie de
la nuit et la matinée, et même si le véhicule n'était
pas aux normes de la morphologie de certains européens,
nous pûmes nous tasser pour continuer notre périple au
travers des cocotiers et des rizières, puisqu'il s'agit de
la région la plus verte de l'Inde où le taux d'humidité
est très élevé.
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Arrivé à Allepey, c'est par une
navigation de trois
heures
sur les canaux des lagunes (backwaters) très reposante te
et pleine de charme bucolique, que continuait cette fin
d'après midi. A Cottayam, nouvelle attente de notre bus qui
devait nous rejoindre aux débarcadères... Une heure, puis
deux… Adieu bus, valises … mais non, le moral restait
excellent malgré tout, même si des pointes d'inquiétudes
pouvaient être décelées ici et là.
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La voici, la voila,
notre merveilleuse monture d'acier aux cris terrifiants fait
nous avons eu beaucoup de mal à faire admettre au
chauffeur, sans paraître offensant que nous eussions
apprécié un 'bémol' à son concert pour 'corne de brume
et clairon indien 'parfaitement envahissant. Une fois la
mission diplomatique menée à
bien, restait, après s'être restaurés en route, à
affronter 'la' partie délicate: joindre l’Hôtel de
Periyar dans la réserve naturelle du meme nom, après quelques très
longues heures d'une petite route de montagne étroite et
ravinée par des pluies récentes. Il est plus d'une heure
du matin lorsque le but est atteint. Mais là commence une
nouvelle tranche d'aventure puisqu'une erreur de
transmission nous condamne à partager les chambres réservées, et il
en manque cinq ou six, de plus tout le monde dort et, déjà,
l'accueil est assez somnanbulesque. Les chambres sont réparties
dans deux établissements, dont l'un est de l'autre côté du
lac...
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Etant dans une réserve animale
http://periyarnationalpark.net/ les bateaux ne doivent plus naviguer après
vingt heures pour préserver le silence sauf dérogation du garde de la réserve.
Enfin et sans
désespérer, nous finissons par régler dans la bonne humeur les différents
problèmes, en 'créant' des chambres de quatre personnes, et de pouvoir affirmer
au petit déjeuner que Georges ronfle aussi, quoiqu'il en dise...Quelle chance,
après une telle suite de difficultés pour moi de trouver aussi le sommeil. Làs,
cela ne durera pas, endormi à quatre heures après avoir numéroté chaque valise
et bordé l'ami Victor, voilà t-y pas qu'on me prend pour un anglais du groupe
voisin, et que leur réveil pour six heures me tire de mon premier sommeil, ou
presque. Rien n'est perdu, car le spectacle des éléphants au lever du jour est
ravissant; le lac artificiel de montagne sur lequel nous évoluerons en bateau
pour rendre visite aux animaux, est d'une rare beauté paisible et la matinée est
toute douceur.
Dans la journée,
nous rejoindrons, plus bas et à l'est la plaine fertile en
riz qui conduit à Maduraï, grouillante à la nuit
tombante, de vélos, cyclopousses et autres véhicules, le
tout nimbé d'un voile de fumées domestiques, qui accentue
l'impression que là se passe quelque chose ...
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Ce n'est qu'une ville sacrée où arrivent les pèlerins
de l'Inde entière et d'ailleurs. A peine 'restaurés' dans notre confortable
hôtel, nous aurons hâte de nous rendre à la cérémonie
religieuse du soir, au temple Minakshi, épouse de Shiva,
que les fervents font vivre au rythme humain en les
accompagnant de la table, au lit et du lit à la table en
passant par de nombreux cérémoniaux de la vie courante, le
tout sous forme de procession dans ce très grand temple
empreint de religiosité, surtout à cette heure, et à la faible lumière des lampes à huile et de leurs fumées. En
un mot, pour nombre d'entre nous, c'est un choc.
Pourquoi, comment,
qu'est ce qui entretient une telle ferveur et un tel rite
ancestral ? Nous repartirons avec nos questions, mais n'est
ce pas aussi un des buts d'un voyage aussi riche que de
s'interroger sur ce qui est tout bêtement différent de
notre quotidien?
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Le lendemain
d'ailleurs nous avons visité l'ensemble de l'édifice qui
à la lumière du jour, prenait un volume différent,
perdait un peu de son caractère sacré. Il faut dire
qu'on vit dans les temples au moins autant qu'on y prie, et
l'activité déployée ajoute sûrement à ce ressenti tout
autre.
Nous rejoignons Tiruchinapali, que chacun nomme Trichi, c'était pourtant si
simple à prononcer, n’est ce pas ? L'arrivée à l'hôtel
est agrémentée de l'annonce d'un cocktail offert par le
directeur de Pleasure Travel, Monsieur Kiran Saff,
correspondant indien de notre Tour Operator parisien. En
effet, Monsieur Singh Sand, tout enturbanné, comme tous les
Sikhs, est venu de Dehli spécialement par avion pour se
faire pardonner les différents inconvénients rencontrés
avec les bus ... et surtout, il est venu avec une grosse
enveloppe pleine de Roupies... que chacun avait avancé généreusement
pour débloquer notre situation à Cochin. Tout va bien et
la soirée est animée après cet apéritif de rhum
local
.... excellent !
Les
visites de Kombakonam et de Tanjore sont de grands moments
de découverte architecturale. Suite a cela nous nous
sommes
envolés vers Madras, capitale du TAMIL HAW, sous un
ciel très chargé et après quarante minutes d’un vol
assez agité au dessus de rizières et cocoteraies, nous étions
conduits à l'hôtel Connemara où un repas et une soirée
sous le signe du carnaval de Goa nous attendaient.
Poissons et fruits de mer, le tout de très bonne qualité
et assez épicé, nous furent servis en musique ...
Magnifique !
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Après la visite
matinale de
Madras, suivie de quelques achats, nous partons
vers le sud, vers notre havre de fin de circuit, en bord de
mer, vers Mahabalipuram. La visite du temple de la mer, ses
sculptures rupestres célèbres que sont « la descente
du Gange » représentant l'ensemble des divinités de
l'Hindouisme lors de leur descente du Gange sur terre qui est à l’origine de
tout...
Enfin le repos, enfin la plage,
voici le Fisherman's Cove, son bar climatisé, sa piscine
avec ses paillotes sous les cocotiers, sa cuisine
remarquable, l'affabilité du personnel, et sa longue plage
écrasée de soleil près du village de pêcheurs. C'est
extra ! C'est tellement agréable que l'idée de repartir le
lendemain matin pour visiter Kanchipuram, n'était
pas envisagée avec grand enthousiasme.
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Cependant, il faut reconnaître que
l'effort est bien récompensé lorsqu'on découvre
cette ancienne capitale des Palava. C'est fabuleux.. Cette ville de pèlerinage
est toute autour d'un gigantesque temple carré aux quatre entrées en forme de
tours sculptées polychromes de vingt mètres de haut minimum. Passée cette
première enceinte, une vingtaine de mendiants infirmes attendent la distribution
de nourriture que font les prêtres à partir des dons de fidèles venus prier avec
des offrandes. Les plus désargentées parmi les fidèles font parfois don de leur
chevelure longue et noire, et c'est ainsi que l’on trouve dans les boutiques qui
forment allée devant ces temples, de longues tresses de cheveux magnifiques qui
seront vendues aux perruquiers du monde entier... Après la visite de la grande
collection de bronzes du temple, nous devions voir travailler le coton et la
soie sur des métiers à tisser assez rudimentaires et faire quelques achats avant
de retourner à la mer et au farniente fort mérité...
Bientôt le temps du
retour s'annonçait et c'est avec nostalgie que nous
quittions notre havre de détente pour nous envoler de
Madras vers Bombay, avec deux heures et demi de retard. Ceci
nous conduit à ne bénéficier que d'une réelle « paire
d'heures » à l'Hôtel Taj Président, avant de
retourner à l’aéroport, d’attendre quatre heures pour
enfin décoller au complet et avec tous les
bagages et Dieu sait si nous nous sommes heurtés à un
personnel lymphatique !!!
Même
Christian a réussi à rentrer dans le 747 avec nous et sa
caméra vidéo bien qu'ayant perdu son
document délivré par les douanes indiennes à l'entrée
du pays. Ce retour "sportif" ne devait prendre fin
qu'après trente cinq heures de transports, entrecoupées de
deux sommeils quand même, car à Roissy, compte tenu des
retards cumulés, le bus que j'avais loué ne nous avait pas
attendu ! C'est après avoir pratiquement
"détourné" un bus d'Air France que nous
réussissons de justesse à avoir notre correspondance à
Orly et nous retrouver à Strasbourg, la tête bourrée de
délicieuses images exotiques, de sons et de parfums
orientaux, en un mot sous le charme des Indes, une fois
encore, car si un pays mérite plusieurs visites, c'est
bien celui-là !
Les indiens méritent d'être rencontrés, leur gentillesse et leur calme irradient
et à leur contact, on se prend à se sentir bon.
Cela ferait il partie des mystères de l'Asie ? Laissez moi y croire !
A
chaque voyageur son Inde ! Vous connaissez un peu la mienne
que j'ai essayé de vous faire partager avec joie. J'espère
vous retrouver prochainement ... sur... ces... lignes .....
Avec toutes mes
amitiés.
Votre secrétaire,
Gerard
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